Déclaration de guerre à la Guerre

Moi, l'humaniste, le pacifiste, le non-violent, l'opposé/opposant à toute forme de violence, seul, dans mon coin, celui de l'oubli des autres – qui n'est pas mon oubli des autres ! -, je déclare… la guerre à la Guerre !

Toute guerre, qu'elle soit menée au nom d'un , d'un État, d'un parti, d'une nation, d'une race, d'une morale, d'une cause, d'une civilisation, d'une, voire de la justice, d'un droit…, quand bien même elle est (dite) défensive, est criminelle dés lors que, par définition, elle emporte la mort d'êtres humains, autrement dit autant de crimes. Une guerre peut être légale au regard du droit des États mais jamais de ceux des gens puisqu'elle est toujours une atteinte à l'intégrité physique, morale (au sens de conscience), intellectuelle, psychologique… d'êtres humains, c'est-à-dire d'enfants, de femmes et d'hommes, qu'elles/ils soient combattants ou non.  Jamais une guerre légale ne peut/pourra prétendre être légitime dés lors qu'elle est toujours cette violation fondamentale, définitive de ce droit universel et inaliénable que tout être humain a du seul fait de son humanité : le droit à la vie.  Une guerre peut se faire pour un tas de motifs, elle est toujours contre la vie, la vie d'êtres humains. Tout acte de guerre est un acte criminel. Aucun acte de guerre n'est jamais seulement un acte criminel isolé : il est toujours un crime contre l'humanité puisqu'en chaque victime il tue, blesse, violente… cette humanité universelle qui est le propre de chaque individu et pas seulement de l'espèce humaine.

La guerre n'est pas le prolongement de la politique sous une autre forme. Elle est la négation de la politique au sens de res publica puisque, en tuant, des individus elle nie ce bien commun caractéristique de la res publica : la vie d'individus. La guerre, en tuant des individus,  ne sert pas l'intérêt général mais des intérêts particuliers, partisans aux dépens de cet intérêt universel qu'est l'humanité.

La guerre est la négation, la réification, la  diabolisation… de l'autre. Or, il ne saurait y avoir d'identité de l'un sans identité de l'autre. L'un ne peut pas être sans l'autre, quelles que soient ses différences, dans la mesure où l'un et l'autre sont les deux faces d'une seule et même pièce – d'une même réalité - : l'humain. Et, de même que le côté pile d'une pièce ne peut être sans que soit aussi le côté face de cette même pièce, en tuant l'autre, l'un se nie, s'ampute, s'anéantit, se déshumanise.

La guerre que l'on mène contre l'ennemi, si elle est bien l'assassinat d'ennemis, c'est-à-dire d'enfants, de femmes et d'hommes différents, n'est jamais l'éradication de l'Ennemi, la suppression de l'altérité. Tuer le bourreau n'est pas abolir la peine de mort mais assassiner un individu. Un système survit toujours à l'amputation d'une partie de ses membres. La suppression d'un système comme une société humaine ne pourrait se concrétiser que par la suppression physique de tous les membres de ce système ainsi que par l'effacement de toute trace, de tout souvenir (livres, monuments, bâtiments, ustensiles, outils… mais aussi… ossements, fosses communes…) de ce système. A l'évidence, l'Histoire nous démontre qu'aucune intention totalitaire, génocidaire de ce genre n'a pu réussir puisqu'elle a gardé la trace de peuples réellement disparus, trace qui, témoignage même des massacres commis, n'est pas seulement le jugement et la condamnation des criminels (qui, avec le temps, ont pu disparaître tout aussi bien que leurs victimes !) mais également le souvenir des victimes et donc, d'une certaine, manière leur survie dans la conscience humaine universelle. Et à supposer même qu'une guerre puisse éliminer tous les humains sauf un(e), cet(te) ultime survivant ne serait plus humain mais un(e) solitaire dès lors qu'il n'y a d'humain et de vie humaine que dans la solidarité, la fraternité, le partage, la communauté… et l'altérité.

Il n'y a pas de bonnes guerres et de mauvaises guerres. Toutes les guerres sont sales parce que criminelles. Il n'y a donc pas de héros ; il n'y a que des… salauds [Et, pour une fois, je me refuse à respecter la parité femmes/hommes car, en matière de guerres, force est de reconnaître que les femmes sont quasiment toujours du côté des victimes et rarement des bourreaux !].

Il n'y a pas de guerres justes car la justice – la véritable justice au regard des droits fondamentaux et des libertés de tous les humains - ne saurait consister à assassiner, même légalement, quelque humain que ce soit et, par là-même, se nier en tant que justice qui se veut protectrice des droits et des libertés des individus et, au-delà, de leurs vies.

Toute guerre est nécessairement terroriste puisqu'elle a pour objet de terroriser l'ennemi afin de le contraindre à capituler, à se soumettre, à se nier dans sa différence, voire à le supprimer et, de ce fait, à anéantir son humanité. Et réciproquement, tout acte de terrorisme est nécessairement un acte de guerre.

La parole est donnée aux armes quand les gens cessent de se parler, de s'écouter, de se comprendre, de se reconnaître pour ce qu'ils sont tous en commun : des humains. Or, quoi qu'on dise, les mots ne tuent pas alors que la parole des armes est toujours meurtrière [Mais il est vrai que c'est souvent au nom de mots que l'on tue].

Une guerre ne fait pas des dégâts collatéraux mais des victimes et seulement des victimes. Autrement dit, elle tue, elle blesse, elle ampute, elle viole, elle fait souffrir dans la chair et l'esprit des individus qui, civils ou militaires, sont d'abord et toujours des êtres humains.

Bien que d'invention humaine une guerre est toujours homicide, du simple assassinat au génocide. La guerre, par essence, est… humanicide.

Toute distinction entre des guerres – bonnes, mauvaises, justes, injustes… - relève de la démagogie, de l'escroquerie intellectuelle, de la manipulation, de l'imposture… : toutes les guerres participent d'une seule et même réalité, d'une seule et même finalité : le crime.

Il y a des années, j'ai refusé de porter l'uniforme – ce travestissement, ce cache-conscience dont certains se complaisent à se vêtir pour mieux se livrer à leurs instincts criminels et dont on revêt d'autres, la majorité, pour les déshumaniser et les réifier en… cibles -. Bien évidemment, je refuserai de prendre les armes contre quelque ennemi que ce soit, me refusant à commettre un assassinat, quand bien même il serait béni par , la nation, le parti, l'État… ou toute autre foutaise car, même, volontairement ou non, déguisé en ennemi, pour moi, l'humaniste libertaire, l'autre est et restera toujours humain, c'est-à-dire un autre moi-même sans le(la)quel(le) je ne puis être moi.

C'est pourquoi, pour mener la guerre à la Guerre je ne prendrai pas les armes. Du moins les armes militaires. J'userai d'autres armes, des armes que d'aucuns pourront considérer comme celles du faible, voire du lâche alors que, pour moi, elles sont celles de l'honneur, de la conscience : l'humour, la dérision, la critique, la dénonciation, l'accusation – au sens de plaidoirie -, la poésie, le sourire, le rire, les larmes, la provocation, le blasphème, la rébellion et, notamment, la désobéissance, la mémoire, la parole, le silence…

Et, parce qu'aujourd'hui, certains, sous la bannière du bien s'en vont en guerre contre celles/ceux qu'ils ont stigmatisé(e)s sous le nom de mal et que, inversement, ces seconds en font de même contre les premiers, je ne pars pas en guerre contre la Guerre le fusil à l'épaule mais la fleur à la bouche ou, plus précisément, au sourire, et dans ma tête ce ne sont pas des bombardiers, des navires, des tanks et autres engins de mort qui vrombissent mais des idées. Des idées de générosité, de solidarité, de fraternité… Et, notamment, cette idée qui, si elle est un petit mot, est un projet – une utopie ? – née par/avec le premier humain : l'humanité. Ma guerre ne sera pas sainte, immuable, illimitée… ou toute autre bondieuserie. Elle s'appellera, comme elle s'est toujours appelée : l'humanisme. Un humanisme joyeux, confiant, tolérant, respectueux, un brin poète… et, surtout, libre et libératoire, un humanisme libertaire.

JC

 


 

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