Anarchisme
et Franc-Maçonnerie
En préliminaire, permettez-moi, de faire une dédicace et quelques citations :
La dédicace d'abord : je dédie mon travail aux :
"imbéciles, qui, ne sachant rien de la Franc-Maçonnerie,
se permettent d'en parler".
Ainsi que :
"Aux imbéciles- souvent les mêmes que les précédent(e)s - qui s'imaginent être anarchistes,
parce qu'ils-elles se disent tel(le)s et, ne sachant en définitive pas ce qu'est l'Anarchisme,
s'autorisent à dire qu'il est incompatible avec le Maçonnisme".
Les citations à présent :
Du F... anarchiste Léo Campion :
"Si les Maçons anarchistes sont une infime minorité, la vocation
libertaire de la Maçonnerie est indéniable (…) elle est la seule association
à laquelle puisse adhérer celui qui n'adhère à rien".
Du F... Oscar Wirth ensuite :
"Franc-Maçonnerie, suprême École de la liberté".
Puis, du F... communard et, peut-être anarchisant, même si cela importe peu de savoir qu'il le fût ou non, Félix Pyat[1].
"Frères, citoyens de la grande partie universelle, fidèles à nos
principes communs : Liberté, Égalité, Fraternité, et plus logique que la
Ligue des Droits de Paris, vous, Francs-Maçons, vous faites suivre vos paroles
de vos actions. Aussi, après avoir affiché votre manifeste – le manifeste du
cœur – sur les murailles de Paris, vous allez maintenant planter votre
drapeau d'humanité sur les remparts de notre ville assiégée et bombardée.
Vous allez protester ainsi contre les balles homicides et les boulets
fratricides, au nom du droit et de la paix universelle".
Du F... anarchiste René Valfort encore :
"Un milieu comme la Franc-Maçonnerie, dont les principes fondamentaux sont : la tolérance, la fraternité, la liberté de pensée, le respect de la personne humaine, dont l'objet principal est l'éducation des individus et la formation d'une élite, ne peut pas être inutile au progrès de l'Humanité. Et de cela les anarchistes, moins que quiconque, ne doivent douter, vu l'importance qu'ils attachent à l'éducation".
Et, enfin, un très bref extrait du Dictionnaire universel de la Franc-Maçonnerie :
"L'Anarchisme est la passion de la Liberté mise en théories. Et
aussi en pratique lorsque faire se peut".
*****
Il n'est pas dans mon propos de disserter en raison, c'est-à-dire d'un point de vue philosophique, historique, psychologique sociologique, politique…, sur la compatibilité ou l'incompatibilité de l'Anarchisme et de la Franc-Maçonnerie, d'autres plus compétents que moi, illustres Anarchistes, FF... et/ou… FF... anarchistes l'ayant déjà fait à maintes reprises.
Mon propos est plus modeste, plus humble. Il s'agit seulement d'évoquer les grandes pages de cet histoire d'amour, passionné, passionnel et passionnant , entre l'Anarchisme et la Franc-Maçonnerie, histoire nourrie du vécu de grand acteurs de ces deux mouvements mais, aussi et sans doute surtout, d'individus dont l'anonymat est la marque de leur honnêteté, ce terme étant pris dans son acception du XVIIème siècle.
Anarchisme et Franc-Maçonnerie sont deux courants de pensée et deux mouvements d'action qui s'inscrivent dans l'humanisme, lequel est né avec la premier humain ayant pris conscience de ce qu'il-elle pouvait naître à son humanité s'il-elle en faisait librement le choix.
Dans les deux cas, à l'origine, il y a nécessairement un choix, le choix de s'engager. Les engagements anarchique et maçonnique sont scellés par la liberté : la liberté du choix de l'individu d'abord qui, un jour, décide d'entrer en anarchisme ou en Franc-Maçonnerie – voire, en l'un ET en l'autre - ; la Liberté ensuite, avec un grand "L", constitutive à la fois de l'humaine condition : l'humanité par différenciation d'avec le non-humain, le pré-humain, l'a-humain, l'in-humain, du projet anarchique et maçonnique : la libération des individus et de la Société humaine et, enfin, de la fin anarchiste et maçonnique : l'achèvement de l'humanité, c'est-à-dire l'avènement d'une Société véritablement humaine.
Ayant la même devise – Liberté – Égalité – Fraternité -, Anarchisme et Franc-Maçonnerie n'ont d'autre culte que la Liberté. L'un comme l'autre sont donc sinon anti-dogmatiques, du moins a-dogmatiques. Et pourtant, des anarchistes et des Francs-Maçons, amants déchirés par l'illusion que l'un(e) trompe l'autre (?), font régulièrement dans le dogmatisme et, usant d'ukases, de lettres de cachets, de fatwas, de bulles…, condamnent et… excommunient l'autre sans se rendre compte que, ainsi, ils déchirent, trahissent, renient… leur engagement et, ainsi, piétinent, bafouent, molestent, violentent,… et même… assassinent la Liberté dont ils se réclament : leur liberté mais, aussi et surtout, celle de l'Autre, celle de l'humaine condition.
Je cite un illustre anarchiste et franc-maçon, Léo Campion :
"Aussi est-il regrettable que des anarchistes sectaires excommunient la Franc-Maçonnerie au nom d'un pseudo-dogme de l'Anarchie (comme si l'Anarchie était anti-tout alors quelles est à-tout) et que les Maçons sous-évolués excommunient l'Anarchie au nom d'un pseudo-dogme de la Maçonnerie (comme si la Maçonnerie n'était que tradition, alors qu'elle est tradition, dialogue et progrès). Ces attitudes sont d'autant moins admissibles qu'au contraire l'Anarchie comme la Franc-Maçonnerie, anti-dogmatiques par essence, sont l'une comme l'autre tout le contraire d'un dogme. Elles qui ont en commun le culte de la Liberté et le sens de la Fraternité, avec comme but l'émancipation de l'Homme".
En fait, s'ils s'entendent sur le point de départ et sur la destination du chemin, Anarchistes et Francs-Maçons, en revanche, ne font pas nécessairement le même choix d'itinéraire, certains des premiers admettant le recours à l'action illégale, certains des seconds n'acceptant que l'action légale. Et cette différence, si elle est bien une ligne de partage de méthodes, n'est pas véritablement une fracture de valeurs, de principes, de philosophie, d'éthique et, in fine, un schisme de l'humanisme.
En effet, la légalité et l'illégalité sont des concepts et des réalités juridiques . Elles sont donc tributaires du Droit en vigueur et, en définitive, de l'Autorité en place qui a le pouvoir d'imposer SON Droit et donc SA conception de ce qui est licite et de ce qui est illicite, notions, elles, éthiques, philosophiques, politiques, voire idéologiques. En la matière, la relativité est donc… la règle : le "ici" et le "maintenant" ne peuvent appeler à aucun… dogmatisme quand on se donne tant soit peu la peine de lire – et comprendre – l'Histoire et, plus simplement, d'être attentif à l'actualité, être curieux des us et coutumes et que, de surcroît, on se revendique anar ou maçon !
Comment un anar ne pourrait pas se sentir chez lui dans une Loge où, par définition, le maçon y est un homme libre ? Et comment, un maçon, parce que, justement, homme libre dans sa loge, pourrait ne pas accepter un anar qui vient librement à sa loge ?
Pourtant, les arguments avancés par certain(e)s FF... et SS... pour considérer que les anarchistes n'ont pas leur place au sein de leurs loges . Je n'en citerai que deux :
ü les anarchistes sont, par nature et dans leurs actes, des… illégalistes alors que, comme le recommandent les Constitutions d'Anderson, un(e) maçon(ne), homme libre mais aussi… de bonnes moeurs, de respecter la Loi ; outre que l'accusation d'illégalisme couvre, en fait, une imposture intellectuelle qui consiste, à l'instar de la C.I.A. et d'Europol, à assimiler anarchisme et terrorisme, je rappellerai que, c'est au nom même de leur engagement maonnique, que des maçon(ne)s parfois, et plus souvent qu'on ne le pense, considérant qu'au-dessus des contingences politiques, économiques, sociales… des lois il y a des lois universelles, comme celles des Droits des humains,désobéissent à la Loi. Je donnerai trois exemple de désobéissance maçonnique : un ancien, les lois racistes et fascistes de Vichy ; un plus récent, l'objection de conscience, en particulier lors de la guerre d'Algérie et un d'actualité, l'entêtement à faire œuvre de fraternité en portant assistance aux demandeurs d'asile et, plus généralement, aux sans papiers alors que, désormais, l'acte de solidarité peut être constitutif d'un délit et passible de prison.
ü l'apprenti(e) jure d'être dévoué(e) à sa patrie alors que, c'est bien connu, les anarchistes n'ont pas… de patrie puisqu'ils-elles se disent internationalistes. Là encore, il s'agit d'une grossière erreur, délibérée ou involontaire, par ignorance : les anarchistes ne sont pas des internationalistes mais des… anationalistes et leur patrie est… l'humanité. L'humanité, une et indivisible, sans considération de nationalité et, bien entendu, de race, de sexe, de métier…, dont le dévouement envers laquelle relève d'un patriotisme bien particulier… la fraternité !
Différence de méthode ai-je dit ; une différence d'action dans et sur le monde profane. Mais cette différence disparaît, s'évanouit au franchissement de la porte du temple puisque, ensemble, FF... et SS..., anarchistes ou non, travaillent ensemble en toute liberté, en pleine égalité, en véritable fraternité.
Les chroniques de l'Histoire comme les archives des Obédiences, du moins pour celles qui ne revendiquent pas une… régularité dont, soit dit en passant, on peut s'interroger sur sa conformité avec le principe de Liberté constitutif de la F... M... , du maçon comme celle de l'humain, attestent de ce que, de la seconde moitié du XIXème siècle à la fin de la première moitié du XXème, quasiment TOUS les grands noms de l'Anarchisme et de l'Anarcho-syndicalisme, sont ceux de FF... et de SS.... [J'ai à votre disposition une liste d'autant plus impressionnante qu'elle est loin d'être exhaustive[2]].
A la différence des marxistes-léninistes, des trotskystes, des maoïstes…, les anarchistes n'ont jamais fait dans l'entrisme. Il ne viendra donc à l'idée de personnes que les anarchistes qui sont entrés en maçonnerie l'ont fait par entrisme, pour la phagocyter. Considérant que la F... M... n'est ni un lobby – politique, économique, social…, pour ne pas dire affairiste, voire maffieux -, ni le tremplin d'aspirations personnelles de pouvoir, de renommée, de prestige, d'avantages divers et variés…, personne ne considérera non plus que l'engagement maçonnique des anarchistes obéissait à un intérêt… intéressé. De telles idées seraient d'ailleurs d'autant plus fallacieuses que, souvent, l'engagement anarchiste est la résultante – la conséquence logique, l'achèvement – de l'engagement maçonnique.
Inversement, quand on connaît le prix à payer de l'engagement anarchiste, personne ne supposera que les maçons qui sont entrés en anarchisme l'ont fait par intérêt… intéressé !
A ce sujet, j'ouvre une parenthèse pour poser une question : aucun anarchiste n'a adhéré à la Charbonnerie alors que de nombreux FF... (à cette époque, il n'y avait pas de SS...) l'ont fait et ce, bien que la Charbonnerie fût constituée pour… renverser la Loi par des méthodes… illégales. D'où ma simple question : pourquoi ?
Est-ce à dire que, depuis la seconde moitié du XXème siècle, sinon l'absence, du moins la rareté de grands noms de l'Anarchisme au sein de la F... M... signifieraient que les anarchistes, délibérément ou non, aient décidé de ne plus entrer en F... M... ou même de la déserter ? Non, cette présence anarchiste au sein de la F... M... est toujours bien vivante, réelle mais elle est plus… discrète pour plusieurs raisons :
§ d'abord parce que, tout simplement, de nos jours, il y a moins de grands noms anarchistes qu'auparavant, non pas parce qu'il n'y a plus de grands anarchistes mais parce que le mouvement anarchiste n'est plus géo-centré mais réparti sur l'ensemble du globe et que, au local (dans tel ou tel pays, voire dans telle ou telle région), les anarchistes fortement investi(e)s dans leur action, nécessairement locale, n'ont plus le temps de rayonner au plan international (ou même national) ;
§ ensuite parce que bon nombre de grands noms de l'anarchisme sont ceux d'auteur(e)s (comme, par exemple, Noam Chomsky) et/ou de militant(e)s qui vivent dans des pays où les obédiences irrégulières sont elles-mêmes inexistantes ou marginales quand les obédiences régulières, comme cela été le cas au XIXème siècle refusent d'accueillir les anarchistes parce ce qu'ils-elles ne sont pas de bonnes mœurs mais, au contraire, d'un athéisme fort… mécréant ;
§ mais également parce, davantage tirés vers l'action que la réflexion – le corpus de la théorie anarchiste étant fort riche – beaucoup d'anarchistes préfèrent, désormais s'investir, dans des O.N.G. (L.D.H., M.R.A.P., Amnesty International, Green Peace…), des associations de proximité (Centres sociaux, Maisons de Quartier, Comité de Quartier, M.J.C…), des actions-expérimentations (squats en particulier)… ;
§ enfin, parce que, sauf circonstances exceptionnelles, l'engagement maçonnique d'un individu lambda n'emporte pas nécessairement la révélation et/ou la promotion de son engagement anarchiste (en ajoutant, naturellement, et… réciproquement !).
Entre eux-elles, les mçon(ne)s s'appellent frères et sœurs ; cela ne gêne aucunement un anarchiste maçon d'appeler ainsi celui-celle qui, dans le monde profane, est juge, policier, patron… car, outre que, se refusant à considérer que la carte fait le territoire et que, à cet instar, l'institution, la fonction, le titre, la classe…et, en somme…. le hasard de la naissance, font – ou défont – l'individu, l'anarchiste, comme le maçon, voit en tout individu ce qui échappe à l'aveuglement ou l'ignorance de certain(e)s : l'humain, c'est-à-dire à la fois l'humanité qu'il partage, malgré leurs différences, même si celles-ci sont, parfois, oppositionnelles, et l'être humain en lequel il se reconnaît fraternellement, en dépit d'éventuelles dissemblances du paraître, et même si cet autre n'est pas véritablement libre, à raison, par exemple, de son aliénation.
Entre eux, et notamment dans leurs actes et propos publics, les anarchistes s'appellent compagnons et compagnonnes[3]. Pour deux raisons essentielles : d'abord, parce que ce terme renvoie au compagnonnage[4] des métiers, manière de s'ancrer dans la tradition ouvrière et d'affirmer son statut de… prolétaire et, ensuite, parce que ce terme, du latin populaire "companio" et du latin classique "cum" et "panis", signifie celui-celle avec le-la-quel-le on partage le pain, c'est-à-dire… la vie. S'agissant de ce second motif, quel plus beau symbole de la fraternité que celui du partage du pain ? quel(le) maçon(ne) ne se retrouve pas dans cette symbolique ? ne peut-on considérer que, d'une certaine manière, pour ne pas dire d'une manière certaine, le terme de compagnon(ne) est la version… profane de celui de frère-sœur, même si, en dehors de la scène publique, les anarchistes n'hésite pas à se donner du frère et de la sœur.
Le partage de la vie… Les anarchistes sont des amant(e)s passionné(e)s de la vie. La vie qu'ils-elles aiment à en mourir quand c'est là le prix à payer pour rester debout, autrement dit libre et donc… humain ou bien encore pour la liberté d'un(e) autre. Les anarchistes aiment la vie avec passion et pourtant leur drapeau est… noir car :
[…] Pourquoi ce drapeau
teint en noir ?
Est-ce une religion suprême ?
L'homme libre ne doit avoir
Pour penser nul besoin d'emblème !
- L'anarchiste n'accorde pas
A ce drapeau valeur d'idole,
Tout au plus n'est-ce qu'un symbole,
Mais en lui-même il porte son trépas
Car annonçant la fin des oripeaux
Il périra comme tous les drapeaux.
En Anarchie où régnera la Science,
Pour tout drapeau, l'homme aura sa conscience.
[Extrait du Chant du drapeau noir, Chanson de Louis Loréal (1922)]
ou bien encore :
[…] Les anarchistes
Ils ont un drapeau noir
En berne sur l'Espoir
Et la mélancolie
Pour traîner dans la vie
Des couteaux pour trancher
Le pain de l'Amitié
Et des armes rouillées
Pour ne pas oublier
Qu'y'en a pas un sur cent et qu' pourtant ils existent
Et qu'ils se tiennent bien bras dessus bras dessous
Joyeux et c'est pour ça qu'ils sont toujours debout
Les anarchistes
(Extrait de Les Anarchistes, paroles et musique de Léo Ferré, 1966]
Au fait, avez vous remarqué que le fond des bannières maçonniques, malgré la lumière, voire les dorures de leurs décors est quasiment toujours… noir ?
Les médias ont fait des gorges chaudes sur les affaires qui ont impliqué des maçon(ne)s, sachant que les errements de quelques individus n'ont pas manqué d'être utilisés pour armer le bras de la croisade anti-maçonnique, née, comme de bien entendu, avec la F... M... elle-même. Il a existé, il existe et il existera de mauvais(es) maçon(ne)s donc, mais quelle société humaine, quel groupement d'individus peut se targuer d'être exempt de faux-frères et fausses-sœurs ; le mouvement anarchiste, dans sa dimension organisationnelle ou sa forme individualiste, compte aussi de faux compagnons et de fausses compagnonnes ? Cette similitude qui existe en matière d'hiatus entre la déclaration de principe – la revendication de l'identité maçonnique ou anarchique – et les propos tenus et, surtout, les actes posés, n'est-elle pas une passerelle de rapprochement entre les tenant(e)s de l'opposition irréductible entre Anarchisme et F... M... ? Un rapprochement, non de compromis – et encore moins de compromission -, pas même une paix des braves, non, juste le partage d'un questionnement :
Pourquoi,
depuis l'aube des temps, les plus beaux
idéaux et, notamment, ceux s'inscrivant dans la tradition et le mouvement
humanistes, invariablement, finissent toujours par être salis par certain(e)s d'entre ceux et celles qui s'en revendiquent ?
[1] Discours tenu le 29 avril 1871 devant 6 000 Francs-Maçons venus de 55 Loges parisiennes avant que ceux-ci n'aillent planter leurs bannières sur différentes barricades et, pour beaucoup, se fassent tuer par les versaillais. Quelques jours après, un ballon libre marqué des trois points symboliques s'éleva dans les airs et sema de nombreux exemplaires du "Manifeste maçonnique du 5 mai" appelant les Maçons de France et du monde entier à lutter en faveur des Communes de France fédérées avec celle de Paris. Le 18 avril 1871, au Palais de la Mutualité, eut lieu la commémoration du centenaire de la Commune de Paris. Sous la présidence de Léo Campion, cette manifestation regroupa toutes les obédiences maçonniques, tous les syndicats, la Ligue de l'Enseignement, la Ligue des Droits de l'Homme, la Ligue Internationale contre le Racisme et l'Antisémitisme, les partis de gauche et… la Fédération anarchiste. Le 24 avril 1971, plus de 3 000 maçon(ne)s, en tenue, bannières déployées, défilèrent devant le Mur des Fédérés du cimetière du Père Lachaise.
[2] Liste dont l'exactitude ne peut être mise en doute car elle recoupe celles des archives de la Police et de la Justice !
[3] Le terme de "compagne" étant réservé à celle qui partage la vie d'un compagnon.
[4] Au sens strict, le compagnonnage est une association ouvrière de solidarité, une préfiguration du syndicat mais également de la Bourse du travail (du moins, celle de Fernand Pelletier). Cette référence à la tradition compagnonnique montre que les anarchistes sont aussi sinon traditionalistes, du moins respecteux-euses des traditions !
ANNEXE
Remarque préliminaire
Il ne s'agit pas de développer ici un argumentaire, historique, philosophique, politique…, sur la compatibilité, voire la longue "histoire d'amour", entre Anarchisme et Franc-Maçonnerie, anarchiste et maçons mais de donner quelques points de repères, quasi exclusivement tirés de "Le drapeau noir, l'équerre et le compas" de Léo Campion[1].
I – Citations
Symbolisme
théologique
Symbolisme maçonnique
Divinité Humanité
Révélation Raison
Privilège Egalité
Charité Solidarité
Grâce Justice
Sujétion Liberté
Léo Campion d'après Michel Bakounine.
Quelques Francs(ches)-Maçon(ne)s anarchistes
(ou inversement ou, encore, réciproquement)
Liste aucunement exhaustive donnée à titre indicatif
Agostino Bertani
Albert Laisant (fils de Charles-Ange Laisant)
André Prévotel
Andrée Prévotel
Aristide Bruant
Auguste Blanqui
Augustin Hamon
Avelinon Gonzalès Mallada
Benoît Malon
Bernard Salmon
Charles Albert
Charles d'Avray
Charles Malato
Charles-Ange Laisant
Chaumette
Delphin
Domela Nieuwenhuis
Donatien Alphonse François, marquis (puis comte) de Sade
Elie reclus
Elisée Reclus
Ernestan (Ernest Tanrez, dit)
Errcico Malatesta
Eugène Pottier[12]
Eugène Varlin
Eusebio Carbo
Fanelli
Fernando Garrido
Francis Jourde
Francisco
Ferrer y Guardia
Frédéric
Stakelberg
Gaston
Leval
Georges
Anquetil
Giuseppe
Dolfi
Gleize
Goupil
Hem Day (Marcel Dieu, dit)
Henri Chassin
Henri Julien
Henriette Rymembroeck
Imianitoff
Jacques Gross
James Guillaume
Jean Biso
Jean Marestan (Gaston Havard, dit)
Jean Roumilhac
Jean-Baptiste Clément
Joaquin Delgado
Jules Rivet
Jules Vallès
Laurent Tailhade
Louis Dubost
Louise Michel[13]
Marius Lepage
Maurice Laisant (fils de Albert Laisant)
Max Stirner
Mazzini
Michel Bakounine[14]
Michel Herbert
Montehus (Gaston Mardoché Brunswick, dit)[15]
Multatuli (Edouard Douwes Dekker)
Nicolo lo Savio
Paraf-Javal
Paul Brousse
Paul Lafargue
Paul Paillette
Paul Reclus (le fils d'Elisée reclus)
Paul reclus (le frère d'Elisée et d'Elie)
Paul Robin
Pierre Kroptokine
Pierre-Joseph Proudhon
Quintanilla
Raymond Lachèvre
Remy-Pierre Boyau
René Valfort
René-Louis Lafforgue
Ricardo Mella
Roumilhac
Salvochea
Sanchez Rosa
Sébastien Faure
Suzy Chevet
Sylvain Maréchal[16]
Tarrida del Marmol
Théodore Jean
Vicente Ballester
Voline (vsevolod Eichenbaum,
dit)
William Godwin
Selon Léo Campion, quelques précurseurs de l'Anarchisme et de la Franc-Maçonnerie : Prométhée, Satan[17], Aristippe, Gorgias, Antisthène, Protogoras, Zénon, Diogène, Cratès de Thèbes, les Carpocratiens (ou Frères et Sœurs du Libre Esprit), certains Cathares et Vaudois, les Adamites, les Almariciens, Rabelais[18], Thomas Müntzer, Erasme, La Boétie, John Lilburn, Diderot, Rousseau, Dom Deschamps, Jacques Roux[19], Thmas Payne, Gracchus Babeuf, la société épicurienne Pantisocraty[20], les Doukhobors (ou Fils de la Liberté)[21]…
Questionnement
Cela fait beaucoup de monde, non ?[22]
Si, au nom d'un ukase, d'un fatwa, d'une bulle… dogmatiques prononcés en vertu d'une irréductible incompatibilité entre Anarchisme et Franc-Maçonnerie, toutes ces personnes, historiquement théoricien(ne)s et praticien(ne)s de l'Anarchisme et de l'Anarchosyndicalisme, étaient rayées des tablettes (sacrées ?!?) de l'Anarchisme et de l'Anarchosyndicalisme au motif qu'elles étaient de la Franc-Maçonnerie, aussi, que resterait-il de l'Anarchisme et de l'Anarchosyndicalisme ? Cette radiation faite, sur quels fondements théoriques pourraient continuer de reposer l'Anarchisme et l'Anarchosyndicalisme puisque, force est d'admettre, que la majorité des théoricien(ne)s majeur(e)s de l'Anarchisme et de l'Anarchosyndicalisme étaient de le Franc-Maçonnerie ?
Est-ce que celles-ceux qui sont tenant(e)s de ce dogme d'incompatibilité savent combien il y a d'anars qui, de nos jours, sont aussi Francs-Mac'[23] ?
Et si la bonne question n'était pas "Est-ce que anarchisme et Franc-Maçonnerie sont compatibles ?" mais "Pourquoi, me disant anar, je ne suis pas Franc-Mac' ?" ?
*****
"Le drapeau noir, l'équerre et le compas" de Léo Campion a été réédité. Vous pouvez le commander sur : http://perso.wanadoo.fr/libertaire/campion.html
[1] Edité par Maison de la Solidarité et de la Fraternité et éditions Alternative Libertaire. Toujours disponible chez Publico.
[2] Certains Ateliers – Loges – refusent également d'accueillir les con(ne)s. Il en est ainsi de l'Atelier Léo Campion, du Grand Orient de France, qui a fait sien ce mot de Léo Campion : "Il faut être impitoyable avec les cons qui n'ont pas de cet organe la saveur et la profondeur".
[3] Article 1er dudit règlement : "La Franc-Maçonnerie, institution essentiellemeent philanthropique, philosophique et progressive, a pour objet la recherche de la vérité, l'étude de la morale et la pratique de la solidarité ; elle travaille à l'amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l'humanité. Elle a pour principe la tolérance mutuelle, le respect des autres et de soi-même, la liberté absolue de conscience. Considérant les conceptions métaphysiques comme étant du domaine exclusif de l'appréciation individuelle de ses membres, elle se refuse à toute affirmation dogmatique. Elle a pour devise : Liberté, Egalité, Fraternité".
[4] Lettre à Karl Marx du 17 mai 1846.
[5] Et ils le firent.
[6] Et ils le firent aussi !
[7] Discours tenu le 29 avril 1871 devant 6 000 Francs-Maçons venus de 55 Loges parisiennes avant que ceux-ci n'aillent planter leurs bannières sur différentes barricades et, pour beaucoup, se fassent tuer par les versaillais. Quelques jours après, un ballon libre marqué des trois points symboliques s'éleva dans les airs et sema de nombreux exemplaires du "Manifeste maçonnique du 5 mai" appelant les Maçons de France et du monde entier à lutter en faveur des Communes de France fédérées avec celle de Paris. Le 18 avril 1871, au Palais de la Mutualité, eut lieu la commémoration du centenaire de la Commune de Paris. Sous la présidence de Léo Campion, cette manifestation regroupa toutes les obédiences maçonniques, tous les syndicats, la Ligue de l'Enseignement, la Ligue des Droits de l'Homme, la Ligue Internationale contre le Racisme et l'Antisémitisme, les partis de gauche et… la Fédération anarchiste. Le 24 avril 1971, plus de 3 000 maçon(ne)s, en tenue, bannières déployées, défilèrent devant le Mur des Fédérés du cimetière du Père Lachaise.
[8] Il s'agit là d'une texte maçonnique symbolique – une planche – glorifiant "l'archie" naturelle.
[9] Conférence de Louise Michel dans sa Loge La Philosophie sociale.
[10] "Heureux temps", chant sur l'air du R"temps des cerises".
[11] C'est sur l'initiative d'une Loge que fut érigé à Bruxelles le monument "A la gloire de Francisco Ferrer, martyr de la liberté de conscience". Il existe plusieurs Loges Francisco ferrer dans diverses obédiences.
[12] Le 24 avril 1906, le Grand orient de France organisa une manifestation pour récolter les fonds nécessaires à l'érection d'un monument à la mémoire d'Eugène Pottier.
[13] Louise ,Michel fut membre d'un Atelier dissident du rite écossais. Bien qu'elle n'en fût pas membre, une Loge du Droit humain (N° 786) porte son nom.
[14] Egalement auteur du "Catéchisme de la Franc-Maçonnerie moderne".
[15] Montehus fut l'ami de Lénine durant l'exil de ce dernier à Paris. Certains affirment que Lénine aurait été initié durant ce séjour et que, rentré en Russie et, surtout, devenu Président du Conseil des Commissaires du Peuple de l'Union Soviétique il aurait tout oublier de son apprentissage.
[16] Révolutionnaire français auteur de : Bergeries, Chansons anacréontiques, l'Âge d'or, Psaumes nouvellement découverts, Dame Nature à la barre de l'Assemblée nationale, Le jugement dernier des rois, La fête de la Raison, Almanach des Honnêtes Gens, Almanach des Honnêtes Femmes… Il collabora, avec Gracchus Babeuf, à la rédaction du "Manifeste des Egaux", [Gracchus Babeuf se suicida pour éviter l'échafaud alors qu'il était sur le point d'être initié], le Dictionnaire des athées anciens et modernes, Culte et Lois d'une société sans dieu…
[17] "[Satan est] l'éternel révolté, le premier libre-penseur et l'émancipateur du monde". Bakounine.
[18] Notamment avec son "Abbaye de Thélème".
[19] Socialiste extrémiste défroqué de la Révolution de 1789.
[20] Créée à Londres, pendant la Révolution française, sur l'initiative du poète Southey.
[21] Communauté chrétienne, anarchiste, non violente protégée par Tolstoï qui leur acheta des terres au Canada où ils (environ 8 000) émigrèrent en 1898 et continuent d'y vivre.
[22] Cette liste ne prend en compte que la seule Europe. Pour mémoire, je rappellerai, par exemple, que le mouvement syndicaliste nord-américain et, singulièrement, celui de l'I.W.W. est directement issu d'un mouvement maçonnique, celui des Chevaliers du Travail qui existe toujours d'ailleurs.
[23] Etant précisé que l'on peut aller à l'Anarchisme à partir de la Franc-Maçonnerie ou inversement.