Je suis celui dont on ne se souvient que quand on a besoin de lui

 

 

Dans l'instant même de la demande, quel que soit le prix à payer – et cela m'a coûté souvent fort cher, très cher -, j'ai toujours répondu aux demandes d'aide, de quelque nature que ce soit, qui ont pu m'être faites.

 

Depuis des années, je galère à essayer de faire front à des ennuis de santé, de fric, de travail, de logement, de solitude (pour ne pas dire d'isolement)… et, la plupart du temps, "on" ne me "sonne" que pour demander mon aide, aide que…. j'accorde toujours. Mais, à chaque fois que j'évoque, avec mots très mesurés, très en dessous de la réalité, mes ennuis, c'est aussitôt la… fuite, le combiné raccroché, le rideau de silence baissé…, même si, peu après, ce(tte) même "on" n'a pas de scrupule à revenir vers moi pour… me demander une nouvelle aide, sans le moindre mot pour mes… ennuis.

 

Depuis peu, je traverse une période encore plus difficile, plus éprouvante avec la maladie cardiaque de Karma, maladie dont l'état a été qualifié de "phase terminale". Il n'est pas facile d'accompagner une personne – fût-elle un… chien – dans les derniers jours de sa vie. Pourtant, à l'exception d'une personne, personne pour… m'aider ou, tout simplement, pour être présent(e).

 

Cette personne, il est vrai, aime les animaux au point d'en avoir fait son métier. Sa présence, assurément, est un réconfort et je ne sais comment l'en remercier. Mais, en même temps, cette présence m'interpelle :

 

Quid des valeurs dont se prévalent compagnon(ne)s, frères et sœurs qui ne m'offrent que… leur indifférence ? Ne s'agit-il que de hochets que l'on agite pour mieux "charmer", pour mieux… paraître ? Quelles sont donc ces valeurs auxquelles j'ai adhéré et j'adhère encore sans réserve ? Moi, le mécréant, me suis-je laissé aller à me piéger moi-même et à… croire à des… illusions, des mensonges, des fadaises, des… inepties ?

 

Mais, si j'ai… cru, n'est-ce pas l'effondrement de la… "cause" à laquelle j'ai librement adhéré ?

 

N'ai-je en définitive d'autre cause… juste que celle de… Karma ? Mais, alors, puisque cette cause est… "perdue", quel est le sens de mon… engagement ? Et s'il n'y a pas de sens, pourquoi l'engagement ? pourquoi s'évertuer à rester debout, à tenir, à résister, à faire front ?

 

Comment supporter cette prise de conscience : je me suis trompé et j'ai bâti ma vie sur… une illusion ? Quelle autre conclusion en tirer que la nécessité d'… effacer l'erreur ?

 

D'un côté, parce qu'il est mon… ami, j'ai la folle envie de voir Karma vivre encore… longtemps pour autant qu'il ne souffre pas parce que, animal, et non humain, je sais que, naturellement, il "aime" la vie, sa vie et, d'un autre côté, j'ai hâte qu'il… "s'en aille" pour que je puisse me libérer de ce "mal-être" qui est le mien, pour pouvoir… m'effacer.

 

Moi, qui n'ai jamais eu le moindre doute quant à ce qu'il me semblait "devoir" faire, aujourd'hui, je ne sais plus. Et j'en souffre.

 

Souffrance qui se rajoute à celle de ne rien pouvoir véritablement faire pour… aider Karma.

 

J'ai toujours aidé et, à présent, je ne puis le faire pour celui qui, depuis presque 11 ans, a donné sens à ma vie et m'a aidé à rester debout. Comment supporter une telle impossibilité, une telle incapacité ?

 

A quoi bon attendre un "train" sur le quai d'une gare déserte quand on sait que le train ne viendra pas, la ligne étant fermée ?

 

Point de haine en moi. Mais de la déception, de l'amertume, du désenchantement… En somme, un réveil brutal à une réalité dans laquelle je me retrouve pas, je ne me sens pas, je ne me reconnais pas puisque, à l'évidence, j'ai toujours vécu dans l'illusion d'un rêve éveillé : celle de… croire que mes valeurs étaient… partagées puisqu'elles étaient, tout de même, beaucoup… revendiquées alors même qu'il ne s'agissait que d'un affichage… hypocrite, voire même mensonger !

 

Désormais, la seule cause à laquelle j'adhère est… Karma. Cette cause est… perdue. Irrémédiablement perdue. Question de jours, voire d'heures. Et je ne saurais avoir cette prétention infondée de considérer que, relativement à moi-même, je suis une cause pour laquelle il est méritant de se battre.

 

Je ne suis pas une cause perdue pour moi-même. Je suis une… illusion.

 

Je suis un mort vivant. Ou, plus exactement, un vivant qui est déjà mort de l'indifférence des autres et qui mourra une seconde fois, définitivement (enfin !) lorsque sera venu le temps de l'effacement.

 

11 juin 2009


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