Terrorisme, révolution, pacifisme et désobéissance

 

"La croisade contre le mal" qui est actuellement menée se fait au non de la lutte contre le terrorisme afin, soi-disant, non seulement de le prévenir mais aussi de l'éradiquer. Les Etats qui se sont ainsi croisés ont la mémoire courte. TOUS, sans exception commune, se sont institués par la violence et, notamment, par le terrorisme. Ainsi, par exemple, c'est par des actes terroristes que les U.S.A. se sont libéré(e)s du joug colonial du Royaume Uni. C'est par des actes terroristes que l'Etat israélien s'est constitué contre la puissance coloniale d'alors (le Royaume uni) mais également contre les Etats arabes et l'O.N.U. et, bien sûr, les Palestinien(ne)s. C'est par des actes terroristes que la France a résisté à l'envahisseur nazi… A plusieurs reprises dans leur histoire, ces Etats ont institué un véritable terrorisme d'Etat comme, par exemple, la France avec la Terreur, les U.S.A. avec le Maccartisme… Hier comme aujourd'hui, ces Etats se livrent, en dehors de leurs frontières, à des opérations (para)militaires et/ou policières de nature fondamentalement terroriste : Panama, Chili, Nicaragua…, Algérie, Congo, Côte d'Ivoire…, Afghanistan, Vietnam, Philippines…, Kosovo, Tchétchénie, Turquie…

Ces mêmes Etats oublient bien entendu que leur nature essenciellement oppressive et répressive est… terroriste et qu'ils se livrent donc régulièrement, sous le couvert de la légalité, à des actes terroristes soit, directement, en ayant recours à leurs gardes-chiourmes, civils et, au besoin, militaires, soit, indirectement, par le biais des entreprises qu'ils protègent et qui, en toute impunité parce que dans la légalité de l'ordre en place, exploitent, affament, exproprient, précarisent, humilient, privent, fléxibilisent, déplacent, déracinent… les non-capitalistes, c'est-à-dire l'écrasante majorité da la population.

Ces mêmes Etats, sous le prétexte fallacieux, de défendre la liberté, la justice, la paix…, interdisent à d'autres Etats de faire ce qu'ils se permettent de faire, comme s'ils voulaient instaurer une nouvelle féodalité avec eux comme suzerains, les autres comme vassaux et, bien entendu, la population des uns et des autres comme… serfs corvéables à merci.

En déguisant leurs discours totalitaires des oripeaux de valeurs humanistes (Liberté, Egalité, Fraternité…) ou légalistes (Droit, Loi, Justice…), en bafouant sans vergogne les conventions, les traités, les institutions qui président au concert des nations… ils les vident de leur sens et donnent raison à celles et ceux, individus, groupes, organisations ou même… (petits) Etats qui considèrent désormais qu'il n'y a d'autre Droit que celui de la Force, d'autre Justice que celle de Lynch, d'autre Fraternité que celle de la "communauté élue"… et que, n'ayant plus rien à perdre, parce que dépossédé(e)s de tout, à commencer par leur liberté et leur identité, le terrorisme ultime – le terrorisme suicidaire - devient la seule voie possible de résistance à la tyrannie planétaire d'un système totalitaire parce que globalisant.

Assurément, les U.S.A. et leurs vassaux vont aller guerroyer contre l'Irak pour, au prix, comme d'habitude, d'innocentes victimes, y adouber un nouveau féal et, au passage, rafler une mise nullement négligeable, la seconde réserve mondiale de pétrole. Alors, Ben Laden – ou alias - n'aura même pas à lancer un nouvel appel à la "guerre sainte", tant les désespéré(e)s se bousculeront aux portillons du terrorisme afin de venger leurs frères et leurs sœurs en oppression !

Si on peut imaginer que certain(e)s dirigeant(e)s sont subitement pris(es) de folie, passagère ou durable, force est de constater que les bureaucraties d'Etat, tant civiles que militaires, sont des appareils parfaitement rationnels et rationalisés et d'une efficacité redoutable, quasiment…. démoniaque. Dans ces conditions, on ne peut admettre que, le terrorisme d'Etat mis en œuvre, aux plans nationaux et international, relève de l'improvisation d'apprentis sorciers qui, à leur corps défendant, par mégarde, ignorance ou ratage et donc involontairement, mettraient le feu aux poudres. Il ne s'agit pas d'un plan savamment préparé mais bel et bien d'une continuité historique, celle de la nature oppressive et, par conséquent, terroriste de l'Etat.

C'est pourquoi, on peut s'interroger sur les chances de succès, aujourd'hui plus que jamais, d'une opposition et, a fortiori, d'une résistance au terrorisme d'Etat qui serait strictement pacifique, pacifiste. En effet, la récente démonstration de force (en terme quantitatif) du refus de la guerre contre l'Irak – et, au-delà, de TOUTES les guerres – faite par des millions de manifestant(e)s s'est d'ores et déjà avérée… inefficace puisque les préparatifs de cette guerre s'accélèrent et que, cette bataille achevée, d'autres guerres suivront.

L'Histoire n'a trace d'aucune révolution pacifique réussie. Jamais une tyrannie n'est tombée devant des martyres. Jamais les armes ne se sont tues devant un sourire ou une fleur. Jamais la Paix n'est née d'une poignée de mains non tâchées de sang. Jamais les possédant(e)s n'ont accepté de partager devant un regard implorant. Car jamais un Etat n'a renoncé à être ce qu'il est : un appareil d'oppression et de répression, un système… terroriste parfaitement rodé !

En revanche, l'Histoire atteste de révolutions, de résistances, de rébellions… violentes et, singulièrement, armées couronnées de succès ou non, selon que le rapport de forces dans lequel elles ont été conduites était ou a fini par tourner ou non à leur avantage. L'Histoire, au passage, atteste d'une autre constante : à quelques très rares exceptions près, tous les mouvements insurrectionnels, libérateurs, défensifs… qui ont réussi à abattre l'Etat auxquels ils s'opposaient ont invariablement (re)construit  un (nouvel) Etat sur les ruines de l'ancien, substitué un pouvoir à un autre et, ainsi, en remplaçant un état par un état, assuré la continuité de l'Etat en tant qu'appareil d'oppression et de répression, que tyrannie.

Et c'est à cause de cette constante historique que les tentations ont été et sont encore grandes de ne pas recourir à la violence ou, du moins, à une organisation, fût-elle… révolutionnaire, de la violence pour abattre un état et, ainsi, de recourir à la non-violence et, plus précisément, au… pacifisme.

Un pacifisme oppositionnel s'inscrit nécessairement dans un rapport de forces qui n'est pas à son avantage puisque la force à l'état brut qu'est un Etat ne peut plier que sous l'effet d'une force qui lui est physiquement, concrètement supérieure et que, aussi nobles soient elles, des valeurs morales ne constituent pas une force physique. S'il se contente d'être un refus de déclaration – de manifestation -, le pacifisme est invariablement voué à l'échec car les Etats, même prétendument démocratiques, sont sourds à la voix du peuple, obsédés qu'ils sont à n'entendre que la seule voix de leur raison dont on sait qu'elle n'est pas celle de la Raison d'une part et que, d'autre part, une voix, celle d'un individu comme d'une foule, peut toujours être… étouffée. Mais le pacifisme oppositionnel peut être un refus d'action s'il prend la forme de la désobéissance dés lors que celle-ci est bel et bien une force au sens physique du terme, la force… d'inertie.

Or, un Etat n'est pas une identité transcendantale : il est une réalité – un maître - qui s'incarne à travers les individus qui le servent, qui l'agissent et le font agir – les contremaîtres - mais aussi, et sans doute surtout, les masses – les esclaves - qui lui obéissent par résignation, par paresse ou lâcheté, par ignorance, par peur… L'Etat n'est un maître que pour autant que les individus renoncent à leur liberté et acceptent d'anéantir leur individualité dans la servitude volontaire du troupeau. Que TOUS les individus meurent au troupeau et naissent à leur individualité et c'en sera fini de l'Etat !

Il n'y a pas de bonnes et de mauvaises guerres, de bons terrorismes et de mauvais terrorismes parce qu'il n'y a pas de bons et de mauvais Etats. L'Etat est une bête immonde qui, tel un caméléon, peut changer d'apparence – mais non d'essence – et qui, tel le sphinx renaît des cendres de ses divers avatars, à savoir les états dans leurs particularités locales et temporelles.

Seul(e)s les anarchistes veulent l'anéantissement de l'Etat  et donc l'abolition de TOUS les états. Même organisé, en tant que projet d'anéantissement de l'Etat et d'instauration d'une société véritablement humaine – l'Anarchie – fondée sur la liberté, l'égalité et la fraternité de TOUS les humains, l'anarchisme reste fondamentalement une démarche individuelle – nullement synonyme d'individualiste au sens péjoratif d'égoïsme – dont le point de départ est une révolte contre toutes les formes d'injustice, d'autorité, d'inégalité, d'assujettissement… Au "Je me révolte, donc nous sommes" de Camus fait donc écho la revendication libertaire de chaque anarchiste "Nous désobéissons, donc je suis" !

Au regard du contexte actuel, plus autoritaire, liberticide, terroriste, intégriste, totalitaire… que jamais, même si le pire reste à venir, il convient donc de promouvoir, de propager, de systématiser… l'acte libérateur/libératoire – émancipateur - par excellence, la révolte individuelle pour faire en sorte qu'enfin meurt le troupeau et naissent les individus, que s'anéantissent dans les oubliettes de la préhistoire de l'humanité TOUS les maîtres et tous les dieux, que le drapeau noir de la révolte anarchiste soit le linceul de tous les drapeaux et que la liberté, l'égalité et la fraternité soient le fossoyeur de l'Etat !

Au lieu d'élire, de manifester, de tempêter, de protester, d'attendre, d'espérer, de rêver… agissons : révoltons nous, désobéissons et alors l'Anarchie naîtra et vivra !

 


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