NI DIEU NI MAITRE
CARNET DE CHANsonS anarchistes
Henry Nadot, 1871
Les canons du Sud ou du Nord,
De l'est ou de l'ouest assourdissent
Ces noirs travailleurs de la mort
Contre la liberté s'unissent
Chefs d'oeuvre de l'art qui détruit
Chers aux despotes qui commandent
Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende !
Celui qui vous poine et celui
Qui vous sert de cible à distance
Sont deux peuples fiers aujourd'hui
D'être ennemi quelle démence
L'arme au pied, le soldat se dit :
Mais la guerre, qui la demande ?
Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende !
La guerre est la destruction
Des princes qu'on subit encore
Chacun se dit je suis lion
Son peuple est l'agneau qu'il dévore
L'esclave chaque jour s'instruit
C'est ce que le maître appréhende
Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende !
On vous doit de dignes exploits
Par vous la bastille est rasée
Et plus tard la ligue des rois
Vers la frontière est repoussée
Mais un César hélas surgit
Des courtisans revient la bande
Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende !
La fumée empêche de voir
Où va tomber l'engin qui tue
Vous obéissez au pouvoir
Qu'il soit au trône ou dans la rue
Le droit au silence est réduit
L'idée en est elle moins grande ?
Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende !
Vous êtes l'instrument brutal
Imitant la voix du tonnerre ;
Instrument comme lui fatal,
Tendant à dépeupler la terre.
Qu'on vous encloue, et que la nuit
Sur tous vos désastres s'étende...
Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende !
Qu'on vous fonde et vous change enfin,
En une pyramide immense
Qu'on y lise sous le burin,
Universelle indépendance
Vers la paix le monde est conduit
Bien qu'encor au sceptre on prétende
Canons, qui faites tant de bruit,
Taisez vos gueules qu'on s'entende !
Eugène Pottier, 1886
On l'a tuée à coup de chass'pots,
A
coup de mitrailleuses,
Et roulée avec son drapeau
Dans la terre argileuse.
Et la tourbe des bourreaux gras
Se croyait la plus forte
Tout ça n'empêche pas Nicholas
Qu'la commune n'est pas morte !
bis
Comme faucheurs rasant un pré,
Comme on abat des pommes,
Les Versaillais ont massacré
Pour le moins cent mille hommes.
Et les cent mille assassinats
Voyez c'que ça rapporte.
Tout ça n'empêche pas Nicholas
Qu'la commune n'est pas morte !
bis
Ils ont fait acte de bandits
Comptant sur le silence,
Ach'vé les blessés dans leur lit,
Dans leurs lits d'ambulance.
Et le sang inondant les draps
Ruisselait sous la porte.
Tout ça n'empêche pas Nicholas
Qu'la commune n'est pas morte !
bis
Les journalistes policiers
Marchands de calomnies
Ont répandu sur nos charniers
Leurs flots d'ignominie.
Les Maxim' Ducamps, les Dumas,
Ont vomi leur eau-forte.
Tout ça n'empêche pas Nicholas
Qu'la commune n'est pas morte !
bis
C'est la hache de Damoclès
Qui plane sur leurs têtes.
A l'enterrement de Vallès
Ils en étaient tout bêtes.
Fait est qu'on était un fier tas
A lui servir d'escorte !
C'qui prouve en tout cas Nicholas
Qu'la commune n'est pas morte !
bis
Bref, tout ça prouve aux combattants
Qu'Marianne a la peau brune,
Du chien dans l'ventre et qu'il est temps
D'crier "Vive la Commune ! "
Et ça prouve à tous les Judas
Qu'ci ça marche de la sorte,
Ils sentiront dans peu, nom de Dieu !
Qu'la commune n'est pas morte !
bis
Jules Jouy, 189?
Pâle ou vermeille, brune ou blonde,
Bébé mignon,
Dans les larmes ça vient au monde,
Chair à guignon.
Ebouriffé, suçant son pouce,
Jamais lavé,
Comme un vrai champignon ça pousse
Chair à pavé
A quinze ans, ça rentre à l'usine,
Sans éventail,
Du matin au soir ça turbine,
Chair à travail.
Fleur des fortifs, ça s'étiole,
Quand c'est girond,
Dans un guet-apens,ça se viole,
Chair à patron.
Jusque dans la moelle pourrie,
Rien sous la dent,
Alors, ça rentre "en brasserie",
Chair à client.
Ca tomb encore : de chute en chute,
Honteuse, un soir,
Pour deux francs, ça fait la culbute,
Chair à trottoir.
Ca vieilli, et plus bas ça glisse...
Un beau matin,
Ca va s'inscrire à la police,
Chair à roussin ;
Ou bien, "sans carte", ça travaille
Dans sa maison ;
Alors, ça se fout sur la paille,
Chair à prison.
D'un mal lent souffrant le supplice,
Vieux et tremblant,
Ca va geindre dans un hospice,
Chair à savant.
Enfin, ayant vidé la coupe.
Bu tout le fiel,
Quand c'est crevé, ça se découpe.
Chair à scalpel.
Patrons ! Tas d'Héliogabales,
D'effroi saisis
Quand vous tomberez sous nos balles,
Chair à fusils,
Pour que chaque chien sur vos trognes
Pisse, à l'écart,
Nous les laisserons vos charognes,
Chair à Macquart !
Eugène Pottier, 1871
Debout, les damnés de la terre.
Debout, les forçats de la faim.
La raison tonne en son cratère,
C'est l'éruption de la fin.
Du passé, faisons table rase.
Foule esclave, debout, debout !
Le monde va changer de base,
Nous ne sommes rien, soyons tout.
Refrain
C'est la lutte finale :
Groupons nous, et demain,
bis
L'Internationale sera le genre humain.
Deuxième couplet
Il n'est pas de sauveurs suprêmes :
Ni Dieu, ni César, ni tribun,
Producteurs, sauvons-nous nous-mêmes !
Décrétons le salut commun !
Pour que le voleur rende gorge.
Pour titer l'esprit du cachot,
Soufflons nous-mêmes notre forge,
Battons le fer quand il est chaud !
au Refrain
Troisième couplet
L'Etat comprime et la loi triche ;
L'impôt saigne le malheureux ;
Nul devoir ne s'impose aux riches ;
Le droit du pauvre est un mot creux.
C'est assez languir en tutelle
L'égalité veut d'autres lois :
"Pas de droits sans devoirs, dit-elle ;
Egaux, pas de devpoirs sans droits."
au Refrain
Quatrième couplet
Hideux dans leur apothéose,
Les rois de la mine et du rail
Ont-ils jamais fait autre chose
Que dévaliser le travail ?
Dans les coffres-forts de la bande
Ce qu'il a créé s'est fondu.
En décrétant qu'on le lui rende
Le peuple ne veut que son dû.
au Refrain
Cinquième couplet
Les Rois nous saoulaient de fumées,
Paix entre nous, guerre aux tyrans !
Appliquons la grève aux armées,
Crosse en l'air et rompons les rangs !
S'ils s'obstinent, ces cannibales,
A faire de nous des héros,
Ils saurons bientôt qur nos balles
Sont pour nos propres généraux
au Refrain
Sixième couplet
Ouvriers, paysans, nous sommes
Le grand parti des travailleurs ;
La terre n'appartient qu'aux hommes,
L'oisif ira loger ailleurs.
Combien de nos chairs se repaissent !
Mais si les corbeaux, les vautours,
Un de ces matins disparaissent,
Le soleil brillera toujours !
au Refrain
(Le Père Duchesne)
Chant de Guillotine de
Ravachol
Goualé
à Montbrison le matin de son exécution
I
Né en nonante-deux,
}
Nom de dieu !
} bis
Mon nom est Pèr' Duchesne.
}
Marat fut un soyeux,
Nom de dieu !
A qui lui porta haine,
Sang-dieu !
Je veux parler sans gêne,
Nom de dieu !
Je veux parler sans gêne.
II
Coquins, filous, peureux,
}
Nom de dieu !
} bis
Vous m'appelez canaille.
}
Dès que j'ouvre les yeux,
Nom de dieu !
Jusqu'au soir je travaille,
Sang-dieu !
Et je couch' sur la paille,
Nom de dieu !
Et je couch' sur la paille.
III
On nous promet les cieux,
}
Nom de dieu ?
} bis
Pour toute récompense,
}
Tandis que ces messieurs,
Nom de dieu !
S'arrondissent la panse,
Sang-dieu !
Nous crevons d'abstinence,
Nom de dieu !
Nous crevons d'abstinence.
IV
Pour mériter les cieux,
}
Nom de dieu !
} bis
Voyez-vous ces bougresses,
}
Au vicair' le moins vieux,
Nom de dieu !
S'en aller à confesse,
Sang-dieu !
Se fair' p'loter les fesses,
Nom de dieu !
Se fair' p'loter les fesses.
V
Quand ils t'appellent gueux,
}
Nom de dieu !
} bis
Sus à leur équipage,
}
Un pied sur le moyeu,
Nom de dieu !
Pour venger cet outrage,
Sang-dieu !
Crache-leur au visage,
Nom de dieu !
Crache-leur au visage.
VI
Si tu veux être heureux,
}
Nom de dieu !
} bis
Pends ton propriétaire,
}
Coup' les curés en deux,
Nom de dieu !
Fous les églises par terre,
Sang-dieu !
Et l'bon dieu dans la merde,
Nom de dieu !
Et l'bon dieu dans la merde.
VII
Peuple trop oublieux,
}
Nom de dieu !
} bis
Si jamais tu te lèves,
}
Ne sois pas généreux,
Nom de dieu !
Patrons,
bourgeois et prêtres,
Sang-dieu !
Méritent la lanterne,
Nom de dieu !
Méritent la lanterne.
Le couplet VI
est le dernier qu'a chanté Ravachol au pied de l'affreuse machine à Deibler.
Martenot, 1893
Il est un produit merveilleux,
Experimenté par la science
Et pour nous les miséreux,
Fera naître l'indépendance.
Tant mieux s'il éclate
Parfois en faisant beaucoup de victimes
Chez nos ennemis les bourgeois,
Cela nous venge de leurs crimes.
Placez une marmite
Bourrée de dynamite
Quelle que soit la maison
En faisant explosion
Ah, comme elle ira vite
Pour inspirer la terreur,
Il n'y a rien d'meilleur
Qu'la dynamite
On guillotine Ravachol,
Un copain qu'avait d'l'envergure
Aujourd'hui c'est un Espagnol
Qu'on fusille pour son allure
Palace sut montrer à son tour
Qu'il était un homme invincible
En plus il promettait qu'un jour
La vengeance serait terrible
Vive la dynamite, puisque l'on nous irrite
A chaque exécution,
Nous mettrons en action
Notre arme favorite
Car pour semer la terreur
Il n'y a rien d'meilleur
Qu'la dynamite
Vous pouvez dresser l'échafaud,
La potence et la guillotine
Nous, nous avons ce qu'il nous faut
Pour vous faire sauter en soupline
Si vous croyez qu'ça finira,
Vous êtes loin de votre affaire
Pour un homme qu'on nous tuera,
Nous en foutrons cinq cent par terre.
Avec la dynamite
Nous répondrons de suite
Casernes et prisons, sans flûtes
Sans violons, danseront au plus vite
Car pour semer la terreur
Il n'y a rien d'meilleur
Qu'la dynamite
Constant Marie
Je suis le vieux Père Lapurge,
Pharmacien de l'Humanité ;
Contre sa bile je m'insurge
Avec ma fille Egalité.
Refrain : J'ai ce qu'il faut dans
ma boutique
Sans le tonnerre et les éclairs,
Pour bien purger toute la clique
Des affameurs de l'univers.
Son mal vient des Capitalistes
Plus ou moins gras,à la ronger,
En avant, les gars anarchistes,
Fils de Marat, faut la purger.
au Refrain
J'ai du picrate de potasse,
Du soufre et du chlore en tonneaux,
Pour assainir partout où passent
Les empoisonneurs de cerveaux.
au Refrain
J'ai des pavés et de la poudre,
De la dynamite à foison,
Qui rivalise avec la foudre
Pour débarbouiller l'horizon.
au Refrain
Le gaz est aussi de la fête :
Si l'on résiste à mes joyaux,
Au beau milieu de la tempête,
Je fais éclater ses boyaux.
au Refrain
J'ai poudre verte et mélinite ;
De fameux produits, mes enfants,
Pour nous débarasser plus vite
De ces mangeurs de pauvres gens.
au Refrain
J'ai pour les gavés de la table
La bombe glacée à servir
Du haut d'un ballon dirigeable
Par les toits, pour les rafraîchir.
au Refrain
Voleuse et traître bourgeoisie,
Prêtres et bandits couronnés,
Il faut que d'Europe en Asie,
Vous soyez tous assaisonnés.
au Refrain
Dans la rue des Bons-Enfants,
On vend tout au plus offrant,
Y avait un commissariat
Et maintenant il n'est plus là.
Une explosion fantastique
N'en a pas laissé une brique,
On crut qu'c'était Fantomas
Mais c'était la lutte des classes.
Un poulet zélé vint vite,
Il portait une marmite,
Qui était à renversement,
Et la r'tourne imprudemment.
Le brigadier, l'commissaire,
Mélés aux poulets vulgaires,
Partent en fragments épars
Qu'on ramasse sur un buvard.
Contrair'ment à c'qu'on croyait,
Y en avait qui en avait,
L'étonnement est profond,
On peut les voir jusqu'au plafond.
Voilà bien ce qu'il fallait
Pour faire la guerre au palais,
Sache que ta meilleure amie,
Prolétaire, c'est la chimie.
Les socialos n'ont rien fait
Pour abrèger les forfaits
D'l'infamie capitaliste
Mais heureusement vient l'anarchiste.
Il n'a pas de préjugés,
Les curés seront mangés,
Plus de patrie, plus de colonies,
Et tout pouvoir, il le nie.
Encore quelques beaux efforts,
Et disons qu'on se fait fort
De régler radical'ment
L'problème social en suspens.
Dans la rue des Bons-Enfants,
Viande à vendre au plus offrant,
L'avenir radieux prend place
Et le vieux monde est à la casse.
Aristide Bruant, 1894
Pour
chanter Veni Creator
Il
faut une chasuble d'or.
Nous en tissons pour vous, grands de l'église
Et nous, pauvres canuts, n'avons pas de chemise
C'est
nous les canuts,
Nous
sommes tout nus.
Pour
gouverner, il faut avoir
Manteaux
ou rubans en sautoir.
Nous en tissons pour vous, grands de la terre,
Et nous pauvres canuts, sans drap on nous enterre
C'est
nous les canuts,
Nous
sommes tout nus.
Mais
notre règne arrivera
Quand
votre règne finira :
Nous tisserons le linceul du vieux monde,
Car on entend déjà la tempête qui gronde.
C'est
nous les canuts,
Nous sommes tout nus.
Paul Paillette, 1895
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Les humains joyeux auront un gros coeur
Et
légère panse.
Heureux on saura - sainte récompense -
Dans l'amour d'autrui doubler son bonheur ;
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Les humains joyeux auront un gros coeur.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
On ne verra plus d'êtres ayant faim
Auprès
d'autres ivres :
Sobres nous serons et riches en vivres ;
Des maux engendrés ce sera la fin.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Tous satisferont sainement leur faim.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Le travail sera récréation
Au
lieu d'être peine.
Le corps sera libre et l'âme sereine
En paix fera son évolution.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Le travail sera récréation.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Nos petits enfants auront au berceau
Les
baisers des mères ;
Tous seront choyés, tous égaux, tous frères ;
Ainsi grandira ce monde nouveau.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Nos enfants auront un même berceau.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Les vieillards aimés, poètes-pasteurs,
Bénissant
la terre,
S'éteindront béats sous le Ciel-Mystère,
Ayant bien vécu loin de ses hauteurs.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Les vieillards seront de bien doux pasteurs.
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Nature sera paradis d'amour.
Femme
souveraine !
Esclave aujourd'hui, demain notre reine,
Nous rechercherons tes "ordres du jour".
Quand nous en serons au temps d'anarchie,
Nature sera paradis d'amour.
Il semble encor loin ce temps d'anarchie,
Mais, si loin soit-il, nous le pressentons.
Une
foi profonde
Nous fait entrevoir ce bienheureux monde
Qu'hélas notre esprit dessine à tâtons.
Il semble encor loin ce temps d'anarchie,
Mais, si loin soit-il, nous le pressentons.
Sébastien Faure
1
Nous sommes les persécutés
De tous les temps et de toutes les races ;
Toujours nous fûmes exploités
Par les tyrans et les rapaces.
Mais nous ne voulons plus fléchir
Sous le joug qui courba nos pères,
Car nous voulons nous affranchir
De ce qui cause nos misères.
Refrain : Eglise, parlement, capitalisme,
état, magistrature,
Patrons et gouvernants,
Libérons-nous de cette pourriture.
Pressant est notre appel,
Donnons l'assaut au monde autoritaire,
Et d'un coeur fraternel,
Nous réaliserons l'Idéal libertaire !
2
CAPITALISME
Ouvriers ou bien paysans,
Travailleurs de la terre ou de l'usine,
Nous sommes, dès nos jeunes ans,
Réduits au labeur qui nous mine.
D'un bout du monde à l'autre bout,
C'est nous qui créons l'abondance ;
C'est nous tous qui produisons
Et nous vivons dans l'indigence.
au Refrain
3
ETAT
L'Etat nous écrase d'impôts :
Il faut payer ses juges, sa flicaille ;
Et si nous protestons trop haut,
Au nom de l' "ordre", on nous mitraille.
Les maîtres ont changé cent fois,
C'est le jeu de la politique ;
Quels que soient ceux qui font les lois,
C'est bien toujours la même clique.
au Refrain
4
PATRIE
Pour défendre les intérêts
Des flibustiers de la grande industrie,
On nous ordonne d'être prêts
A mourir pour notre patrie.
Nous ne possédons rien de rien,
Nous avons horreur de la guerre ;
Voleurs, défendez votre bien,
Ce n'est pas à nous de le faire.
au Refrain
5
UNION
Déshérités, soyons amis,
Mettons un terme à nos tristes disputes.
Debout ! ne soyons plus soumis,
Organisons la Grande Lutte.
Tournons le dos aux endormeurs,
Qui bercent la misère humaine,
Clouons le bec aux imposteurs
Qui sèment entre nous la haine.
au Refrain
6
REVOLTE
Partout sévit l'Autorité :
Des gouvernants l'Internationale
Jugule notre liberté
Dont le souffle n'est plus qu'un râle.
L'heure a sonné de réagir ;
En tous lieux la Révolte gronde.
Compagnons, sachons nous unir
Contre tous les Maîtres du Monde !
au Refrain
Charles d'Avray
I
Tu veux bâtir des cités idéales,
Détruis d'abord les monstruosités,
Gouvernement, casernes, cathédrales
Qui sont pour nous autant d'absurdités.
Dès aujourd'hui vivons le communisme,
Ne nous groupons que par affinités,
Notre bonheur naîtra de l'altruisme,
Que nos désirs soient des réalités !
Refrain :
Debout, debout, compagnons de misère,
L'heure est venue, il faut nous révolter.
Que le sang coule et rougisse la terre,
Mais que ce soit pour notre liberté.
C'est reculer que d'être stationnaire,
On le devient de trop philosopher.
Debout, debout, vieux révolutionnaires,
Et l'anarchie enfin va triompher ! (bis)
II
Empares -toi maintenant de l'usine,
Du Capital, ne sois plus serviteur,
Reprends l'outil et reprends la machine,
Tout est à tous, rien n'est à l'exploiteur.
Sans préjugés, suis les lois de nature,
Et ne produis que par nécessité,
Travail facile ou besogne très dure
N'ont de valeur qu'en leur utilité.
au Refrain
III
On rêve amour au-delà des frontières,
On rêve amour aussi de ton côté,
On rêve amour dans les nations entières,
L'erreur fait place à la réalité.
Oui, la Patrie est une baliverne,
Un sentiment doublé de lâcheté,
Ne deviens pas de la viande à caserne,
Jeune conscrit, mieux te vaut déserter.
au Refrain
IV
Quand ta pensée invoque ta confiance,
Avec la science il faut te concilier,
C'est le savoir qui forge la conscience,
L'être ignorant est un irrégulier.
Si l'énergie indique un caractère,
La discussion envie la qualité,
Entends, réponds, mais ne soit pas sectaire,
Ton avenir est dans la vérité.
au Refrain
V
Place pour tous au banquet de la vie,
Notre appétit seul peut se limiter,
Que pour chacun la table soit servie,
Le ventre plein, l'Homme peut discuter.
Que la nitro comme la dynamite
Soient là pendant qu'on discute raison,
S'il est besoin, renversons la marmite,
Mais de nos maux, hâtons la guérison.
au Refrain
Montéhus, 1923
1
Sur c'te butt'là y'avait pas d'gigolettes,
Pas de marlous, ni de beaux muscadins ;
Ah ! C'était loin du Moulin d'la galette
Et de Panam', qu'est le roi des pat'lins.
C'quelle en a bu du beau sang, cette terre !
Sang d'ouvriers et sang d'paysans,
Car les bandits qui sont cause des guerres
N'en meur'nt jamais, on n'tue qu'les innocents !
Refrain
La Butt' Rouge c'est son nom, l'baptêm' s'fit un matin
Où tous ceux qui montaient roulaient dans le ravin ...
Aujourd'hui y a des vign's, il y pousse du raisin
Qui boira ce vin là, boira l'sang des copains !
2
Sur c'te butt'-là on n'y f'sait pas la noce
Comme à Montmartre où l'champagne coul' à flots ;
Mais les pauvr's gars qu'avaient laissé des gosses
Y f'saient entendr' de terribles sanglots !
C'quelle en a bu des larmes , cette terre,
Larmes d'ouvriers, larmes de paysans,
Car les bandits qui sont cause des guerres
Ne pleur'nt jamais, car ce sont des tyrans !
Refrain
La Butt' Rouge c'est son nom, l'baptêm' s'fit un matin
Où tous ceux qui montaient roulaient dans le ravin ...
Aujourd'hui y a des vign's, il y pousse du raisin
Qui boit de ce vin là, boit les larmes des copains !
3
Sur c'te butt'-là on y r'fait des vendages,
On y entend des cris et des chansons ;
Filles et gars doucement y échangent
Des mots d'amour qui donnent le frisson.
Peuv'nt-ils songer dans leurs folles étreintes,
Qu'à cet endroit, où s'échang'nt leurs baisers,
J'ai entendu, la nuit, monter des plaintes
Et j'y ai vu des gars au crân' brisé !
Refrain
La Butt' Rouge c'est son nom, l'baptêm' s'fit un matin
Où tous ceux qui montaient roulaient dans le ravin ...
Aujourd'hui y a des vign's, il y pousse du raisin
Mais, moi, j'y vois des croix portant l'nom des copains !
1968
Makhnovtchina,
Makhnovtchina,
Tes
drapeaux sont noirs dans le vent.
Ils
sont noirs de notre peine,
}
Ils
sont rouges de notre sang.
} bis
Par
les monts et par les plaines,
Dans
la neige et dans le vent,
A
travers toute l'Ukraine,
}
Se
levaient nos partisans.
} bis
Au
printemps, les traités de Lénine
Ont
livré l'Ukraine aux Allemands.
A
l'automne la Makhnovtchina
}
Les
avaient jetés au vent.
} bis
Makhnovtchina,
Makhnovtchina
Tes
drapeaux sont noirs dans le vent.
Ils
sont noirs de notre peine,
}
Ils
sont rouges de notre sang.
} bis
L'armée
blanche de Déquinine
Est
entrée en Ukraine en chantant,
Mais
bientôt la Makhnovtchina
L'a
dispersé dans le vent.
Makhnovtchina,
Makhnovtchina,
Armée
noire de nos partisans,
Qui
voulaient chasser d'Ukraine
A
jamais tous les tyrans.
Makhnovtchina,
Makhnovtchina
Tes
drapeaux sont noirs dans le vent.
Ils
sont noirs de notre peine,
}
Ils
sont rouges de notre sang.
} bis
1968
Eh
bien Marianne, avec des flics
A
joué la démocratie,
Sur
trois passants, y a deux indics,
Et
le troisième est en habit
Eh
bien Marianne avec ta clique
A
joué encore mieux qu'en Grèce
Sur
trois passants, y a deux indics,
Et
le troisième est CRS.
Mais
sous tes airs de fine gueule
Il
y a la révolution qui gronde,
Il
y a la révolution qui gueule,
Et
moi, j'aime Marie ma blonde
Eh
bien Marianne avec tes armes
Brisé
le nom de nos cercueils
A
Paris devant tes gendarmes
Il
faut oser porter le deuil
Tu
nous a déjà fait Charonne,
C'était
bien pour un premier tour.
T'as
rempilé à la Sorbonne
Et
t'as gagné à billancourt
Mais
sous tes airs de fine gueule
Il
y a la révolution qui gronde,
Il
y a la révolution qui gueule,
Et
moi, j'aime Marie ma blonde
Tu
me feras l'âme soumise
Tu
interdiras mes chansons
Et
pour peu que tu me relises
Je
finirai dans tes prisons
Et
l'on y fait vite finir,
On
dit que le silence est d'or
Mais
je crierai pour le plaisir
Eh
bien Marianne avec tes morts
Mais
sous tes airs de fine gueule
Il
y a la révolution qui gronde,
Il
y a la révolution qui gueule,
Et
moi, j'aime Marie ma blonde
Et
qu'on nevienne pas me dire
Que
je fais commerce de mots
Je
ne joue pas les faux martyrs
De
la faucille et du marteau,
Je
ne joue pas les faux maos,
Ni
les anars façon seixième,
Convaincus
d'apprendre aux prolos
A
chanter Gloire au dix-septième.
Mais
sous les airs un peu bégueuls
Il
y a la révolution qui gronde,
Il
y a la révolution qui gueule,
Et
moi, j'aime Marie ma blonde
La
liberté qu'on assassine
Je
ne la vends pas en chanson
J'habite
à coté d'une usine
Et
ne connait pas les salons.
Mais
j'ai vu de mes yeux de gosse
Tant
de vérités sur les murs
Que
j'eus la révolte précoce
Et
tôt mes premières blessures.
Mais
sous mes airs un peu bégueuls
Il
y a la révolution qui gronde,
Il
y a la révolution qui gueule,
Et
moi, j'aime Marie ma blonde
Jean
Roger Caussimon
Préparez
vos fusils et créez vos milices
Nostalgiques
du tir et chasseurs sans gibiers
"Des
fois que des loubards viendraient dans le quartier"
Vivez
votre penchant, soyez de la police...
A
l'abri des volets de vos pavillons tristes
Meublez
vos insomnies jusqu'au jour incertain
Car
la rue est peuplée de sombres anarchistes,
De
noirs, de portugais et de nord-africains...
Vous,
vous êtes français, français à part entière
Même
anciens combattants et parfois résistants
Et
cet obscur chemin de torture et de sang
"Certains
le referait s'il était à refaire"...
Vous
avez mérité avant le dernier souffle
De
vivre dans le calme et la tranquilité
D'endosser
vos gilets, de chausser vos pantoufles
Et
de fermer les yeux sur la réalité...
Mais
la réalité déferle à votre porte
Vous
ne comprenez rien à sa vague rumeur
Et
vous confondez tout, parfois vous avez peur
D'un
signe avant-coureur que le vent vous apporte...
Vous
percevez des pleurs et des cris de souffrance
Des
chants liberté, l'écho d'un attentat
Vous
pensez que la guerre est encore loin de france
Et
vous faites confiance à votre chef d'état...
"Etudiants
et voyous c'est bien la même engeance !"
C'est
écrit noir sur blanc, dans votre quotidien
Faites
dresser des murs et dressez votre chien
Pensez
dès maintenant à votre auto-défense...
Et
quand des jeunes gens défilent en cortège
Toujours
on vous les peint veules et fainéants
Alors
vous les reniez, vous tombez dans ce piège
En
oubliant qu'ils sont enfants de vos enfants...
Ils
savent mieux que nous, de quoi le monde crève
Que
le temps des robots vient à pas de géants
Qu'on
sacrifie l'Esprie au profit de l'argent
Comme
on tue la nature, la joie et le rêve...
Préparez
vos fusils et créez vos milices
Nostalgiques
du tir et chasseurs sans gibiers
"Des
fois que des loubards viendraient dans le quartier"
Suivez
votre penchant, soyez de la police...
Comité
de Maintien Des Occupations
1968
Rue
Gay-Lussac, les rebelles
N'ont
qu'les voitures à brûler.
Que
vouliez vous donc, la belle,
Qu'est
ce donc que vous vouliez ?
Refrain
Des
canons par centaines,
Des
fusils par milliers,
Des
cons, des fusils,
Par
centaines et par milliers
Dites
moi comment s'appelle
Ce
jeu-là que vous jouiez ?
La
règle en parait nouvelle,
Quel
jeu, quel jeu singulier !
au Refrain
La
révolution, la belle,
Est
le jeu que vous disiez.
Elle
se joue dans les ruelles,
Elle
se joue grâce aux pavés.
au Refrain
Le
vieux monde et ses séquelles,
Nous
voulons les balayer.
Il
s'agit d'être cruel,
Mort
aux flics et aux curés.
au Refrain
Ils
nous lancent comme grêle
Grenades
et gaz chlorés;
Nous
ne trouvons que des pelles,
Des
couteaux pour nous armer.
au Refrain
Mes
pauvres enfants dit-elle,
Mes
jolis barricadiers,
Mon
coeur, mon coeur en chancelle
Je
n'ai rien à vous donner.
au Refrain
Si
j'ai foi dans ma querelle
Je
n'crains pas les policiers.
Il
faut qu'elle devienne celle
Des
camarades ouvriers.
au Refrain
Le
Gaullisme est un bordel,
Personne
n'en peut plus douter.
Les
bureaucrat's aux poubelles,
Sans
eux on aurait gagné.
au Refrain
Rue
Gay-Lussac, les rebelles
N'ont
qu'les voitures à brûler.
Que
vouliez vous donc, la belle,
Qu'est
ce donc que vous vouliez ?
au Refrain
1968
Les
403 sont renversées,
La
grève sauvage est générale
Les
ports finissent de brûler,
Les
enragés ouvrent le bal
Il
est 5 h, Paris s'éveille, Paris s'éveille
Les
blousons noirs sont à l'affut
Lance-pierrs
contre lacrymogènes
Les
flics tombent morts aux coins des rues
Nos
petites filles deviennent des reines
Il
est 5 h, Paris s'éveille, Paris s'éveille
La
tour Eiffeil a chaud aux pieds,
L'arc
de triomphe est renversé
La
place vendôme n'est que fumée,
Le
Panthéon s'est dissipé
Il
est 5 h, Paris s'éveille, Paris s'éveille
Les
maquisards sont dans les gares,
A
Notre Dame on tranche le lard
Paris
retrouve ses fêtards,
Ses
flambeurs et ses communards
Il
est 5 h, Paris s'éveille, Paris s'éveille
Toutes
les centrales sont investies,
Les
bureaucrates exterminés
Les
flics sont sans merci
Pendus
à la tripaille des curés.
Il
est 5 h, Paris s'éveille, Paris s'éveille
Le
vieux monde va disparaitre,
Après
Paris le monde entier
Les
ouvriers sans dieux, sans maîtres,
Autogestionnent
la cité
Il
est 5 h, Paris s'éveille,
Le
nouveau monde s'éveille
Il
est 5 h,
Et
n'auront jamais sommeil
1968
Déjà
la mère à la maison
Nous
criait vivez vos passions,
Par
la fenêtre
Et
j'appelais tous les copains,
Les
petites filles des voisins
Pour
aller tenir dans nos mains,
La
mitraillette
C'était
celle d'un très vieux cousin
Qu'avait
rougi du stalinien,
Dans
l'Espagne en fête
Faut
dire qu'les syndicats bordel,
Nous
pourchassaient dans les ruelles,
Rien
qu'à nos têtes
On
était déjà les rebelles
Qui
remplissions toutes les poubelles
Des
idées anciennes et nouvelles,
Sans
mitraillettes
Curés,
salauds, patrons pêle-mêle
Vous
n'aurez pas longtemps vie belle,
Viendra
la fête
Y
aura le jeu du plus cruel
On
empaillera le flic modèle
Pour
que plus tard on se rappelle,
Leur
drôle de tête
Faut
dire qu'on y mettra du coeur
Les
pétroleuses étaient nos soeurs,
Vienne
la tempête
Makhno
Villa et Durruti
Ont
déjà su manier l'outil
Qui
fait revivre la poésie,
La
mitraillette
On
en r'filera même à Bonnot
Pour
qu'il revienne dans son auto,
Trancher
des têtes
Et
l'on verra cette société
Spectaculaire
assassinée
Par
les soviets du monde entier,
A coups de mitraillettes
J'avions
reçu commandement
De
partir pour la guerre,
Je
ne me soucions point pourtant
D'abandonner
not' mère
Pourtant
l'a ben fallu,
}
J'ai
pris mon sac et j'suis venu
} bis
I'
m'ont donné un grand fusil,
Un
sabre, une gibecière,
Une
grande capot', un grand tapis,
Pendant
jusqu'au darrière
Et
fallait s'tenir drêt,
}
aussi
drêt qu'un pique, un piquet
} bis
I'
y en avaient sur leurs chevaux
Qui
faisaient bien deux mètres,
Avec
deux ou trois plumes d'zosiaux
Plantés
dessus leur tête
Et
des poils d'artillons
}
Tout
alentour de leurs talons
} bis
I'
m'ont placé en faction
Devant
une citadelle
Ceux
qui n'connaissions point mon nom,
M'appelions
sentinelle
A
chaque chat qui passait,
}
Fallait
crier cou qu'chi, cou qu'chest
} bis
I'
m'ont amené dans un grand champ
Qu'appelions
champ de bataille
On
s'étripait, on s'épiaulait,
C'était
pis que d'la volaille
Ma
foi la peur m'a pris,
J'ai
pris mon sac et j'suis parti
Ma
foi la peur m'a pris,
J'ai
pris mon sac et me voici.
Paroles
et musique de Renaud Séchan, 1974
Ils
s'embrassent au mois de janvier,
car
une nouvelle année commence,
mais
depuis des éternités
l'a
pas tell'ment changé la France.
Passent
les jours et les semaines,
y'a
qu'le décor qui évolue,
la
mentalité est la même,
tous
des tocards, tous des faux culs.
Ils
sont pas lourds, en février,
à
se souvenir de Charonne,
des
matraqueurs assermentés
qui
fignolèrent leur besogne.
La
France est un pays de flics,
à
tous les coins d'rue y'en a cent,
pour
faire régner l'ordre public
ils
assassinent impunément.
Quand
on exécute au mois de mars,
de
l'autr' coté des Pyrénées,
un
anarchiste du pays basque,
pour
lui apprendre à s'révolter,
ils
crient, ils pleurent et ils s'indignent
de
cette immonde mise à mort,
mais
ils oublient qu'la guillotine
chez
nous aussi fonctionne encore.
Etre
né sous l'signe de l'hexagone
c'est
pas c'qu'on fait de mieux en c'moment
et
le roi des cons, sur son trône,
j'parierais
pas qu'il est all'mand.
On
leur a dit, au mois d'avril,
à
la télé, dans les journaux,
de
pas se découvrir d'un fil,
que
l'printemps c'était pour bientôt.
Les
vieux principes du seizième siècle,
et
les vieilles traditions débiles,
ils
les appliquent tous à la lettre,
y
m'font pitié ces imbéciles.
Ils
se souviennent, au mois de mai,
d'un
sang qui coula rouge et noir,
d'une
révolution manquée
qui
failli renverser l'histoire.
J'me
souviens surtout d'ces moutons,
effrayés
par la liberté,
s'en
allant voter par millions
pour
l'ordre et la sécurité.
Ils
commemorent, au mois de juin,
un
débarquement d'Normandie,
ils
pensent au brave soldat ricain
qu'est
v'nu se faire tuer loin d'chez lui.
Ils
oublient qu'à l'abri des bombes,
les
français criaient : vive Pétain,
qu'ils
étaient bien planqués à Londres,
qu'y'
avait pas beaucoup d'Jean Moulin.
Etre
né sous l'signe de l'hexagone,
c'est
pas la gloire, en vérité,
et
le roi des cons, sur son trône,
me
dites pas qu'il est portugais.
Ils
font la fête au mois d'juillet,
en
souv'nir d'une révolution
qui
n'a jamais éliminé
la
misère et l'exploitation.
Ils
s'abreuvent de bals populaires,
d'feux
d'artifice et de flonflons,
ils
pensent oublier dans la bière
qu'ils
sont gouvernés par des cons.
Au
mois d'août c'est la liberté,
après
une longue année d'usine,
ils
crient : vive les congés payés ;
ils
oublient un peu la machine.
En
Espagne, en Grèce ou en France,
ils
vont polluer toutes les plages,
et,
par leur unique présence,
abîmer
tous les paysages.
Lorsqu'en
septembre on assassine
un
peuple et une liberté
au
coeur de l'Amérique latine,
ils
sont pas nombreux à gueuler.
Un
embassadeur se ramène,
bras
ouverts il est accueilli,
la
fascisme c'est la gangrène,
àSantiago
comme à Paris.
Etre
né sous l'signe de l'hexagone,
c'est
vraiment pas une sinécure,
et
le roi des cons, sur son trône,
il
est français ça j'en suis sûr.
Finies
les vendanges en octobre,
le
raisin fermente en tonneaux,
ils
sont très fiers de leurs vignobles
leurs
côtes-du-rhône et leurs bordeaux.
Ils
exportent le sang de la terre
un
peu partout à l'étranger,
leur
pinard et leur camembert,
c'est
leur seule gloire à ces tarés.
En
novembre au salon d'l'auto,
ils
vont admirer par milliers
l'dernier
modèle de chez Peugeot,
qu"ils
pourront jamais se payer.
La
bagnole, la télé, l'tiercé,
c'est
l'opium du peuple de France,
lui
supprimer c'est le tuer,
c'est
une drogue à accoutumance.
En
décembre, c'est l'apothéose,
la
grande bouffe et les p'tits cadeaux,
ils
sont toujours aussi moroses,
mais
y'a d'la joie dans les ghettos.
La
Terre peut s'arrêter d'tourner,
ils
rat'ront pas leur réveillon,
moi
j'voudrais tous les voir crever,
étouffés
de dinde aux marrons.
Etre
né sous l'signe de l'hexagone,
on
peut pas dire qu'ça soit bandant.
Si
le roi des cons perdait son trône,
y'aurait
cinquante millions de prétendants.
Léo
Ferré, mai 68
Y'en
a pas un sur cent et pourtant ils existent
La
plupart espagnols allez savoir pourquoi
Faut
croire qu'en Espagne on ne les comprend pas
Les
anarchistes
I
ls ont tout ramassé
Des
beignes et des pavés
Ils
ont gueulé si fort
Qu'ils
peuvent gueuler encor
Ils
ont le coeur devant
Et
leurs rêves au mitan
Et
puis l'âme toute rongée
Par
des foutues idées
Y'en
a pas un sur cent et pourtant ils existent
La
plupart fils de rien ou bien fils de si peu
Qu'on
ne les voit jamais que lorsqu'on a peur d'eux
Les
anarchistes
Ils
sont morts cent dix fois
pour
que dalle et pour quoi ?
Avec
l'amour au poing
Sur
la table ou sur rien
Avec
l'air entêté
Qui
fait le sang versé
Ils
ont frappés si fort
Qu'ils
peuvent frapper encor
Y'en
a pas un sur cent et pourtant ils existent
Et
s'il faut commencer par les coups d'pied au cul
Faudrait
pas oublier qu'ça descend dans la rue
Les
anarchistes
Ils
ont un drapeau noir
En
berne sur l'espoir
Et
la mélancolie
Pour
trainer dans la vie
Des
couteaux pour trancher
Le
pain de l'Amitié
Et
des armes rouillées
Pour
ne pas oublier
Qu'y'en
a pas un sur cent et qu'pourtant ils existent
Et
qu'ils se tiennent bien bras dessus bras dessous
Joyeux,
et c'est pour ça qu'ils sont toujours debout
Les
anarchistes