Le rêve du compagnon ou la fraternité libertaire[1]

 

Alain Pessin

 

Aussi longtemps que demeura persistante l'ancienne tradition révolutionnaire, issue de 1789, l 'épithète et l'apostrophe communément en usage dans le mouvement ouvrier fut celle de "citoyen". Le terme est utilisé généralement dans la Première Internationale. Bakounine l'emploie, lui préfère initialement celui de "patriote", mais, après l'abandon de tout soutien aux mouvements républicains nationaux, ne s'adresse plus qu'à ses "compagnons". Après l'éclatement de l'Internationale, les autoritaires adoptèrent l'apostrophe de "camarade", toujours en usage dans le monde communiste, tandis que les anarchistes ne se qualifiaient plus due par le terme de "compagnons".

A la fin du XIXème siècle, lorsqu'après 1881 le mouvement anarchiste se fût constitué comme force autonomie dans le courant socialiste, le terme de compagnon devint ainsi synonyme d'anarchiste. Dans ces années, pour un observateur bourgeois comme Mermeix, l'emploi de ce terme est un signe de reconnaissance suffisant : lorsqu'un intervenant apostrophe une assemblée ouvrière par le mot ;"compagnons", il s'agit infailliblement d'un anarchiste[2]. Aussi la chronique parle-t-elle indifféremment des" anarchistes" ou des "compagnons", et ce, depuis lors, tout au long de l'histoire. du mouvement libertaire.

 

1. Les anarchistes et l'ancien compagnonnage

 

Une liaison entre cette: dénomination anarchiste et le terme de l'ancien compagnonnage, celui de la tradition du "Tour de France", est tentante à plus d'un titre, mais demande néanmoins de sérieux éclaircissements. Le rapprochement est d'abord tentant pour deux raisons : celle des métiers en premier lieu, puisque le compagnonnage est par nature l'affaire d'artisans, qu'il ne peut avoir de vivacité dans l'industrie, et que l'anarchie de son côté se répand essentiellement dans les petits métiers, les mêmes métiers d'échoppe ou de chantier où l'apprenti pourra devenir possesseur de ses instruments de travail, mais assez tard, dans sa carrière, et perfectionne son savoir-faire en se déplaçant d'un patron à l'autre, procédé qui ne peut avoir d'efficacité ni de sens pour le travailleur de fabrique. L'anarchiste se sent donc bien dans son ouvrage à la façon des anciens compagnons.

La seconde raison tient en une pratique anarchiste ajoutant à cette circonscription des travaux l'aspect du déplacement continuel et lointain : la pratique des « trimardeurs » 2. Le trimardeur, anarchiste des routes, propagandiste errant, renoue avec la tradition des anciens compagnons en l'inversant. L'individu allait à celui qui sait, pour apprendre son devenir. Et les espaces se constituaient pour lui comme parcelles d'un savoir dont le faire, pour être essentiel, n'était pas la seule composante : les liens avec d'autres compagnons rencontrés chez la Mère , les échanges avec les populations locales, n'étaient pas les moindres aspects de cette formation générale. Avec le trimardeur libertaire, c'est, maintenant que les univers s'uniformisent dans la croissance industrielle et urbaine, celui qui possède le savoir du devenir, qui va visiter ceux qui ne le possèdent pas encore.

Toutefois, et malgré l'importance que l'on peut accorder aux rêves de l'espace, du voyage, de l'homme sans fixité, plusieurs éléments viennent faire obstacle à ce possible rapprochement. Les anarchistes se défendent tout d'abord d'accorder une signification spéciale au mot "compagnon". Il s'agit là, pour les libertaires d'aujourd'hui que nous interrogeons, d'une dénomination dont on a plus ou moins perdu le sens, mais surtout à laquelle on ne croit guère pouvoir attribuer un sens particulier. On dit couramment compagnon de travail, compagnon de jeu, compagnon et compagne d'existence, ceux que la vie rassemble et qui se choisissent pour leurs, ceux donc qui, dans la simplicité de l'étymologie, « rompent ensemble le pain », et c'est de ce sens très général seulement qu'il se peut agir, mais tout autre terme renvoyant à ce simple partage aurait pu convenir. Notre tâche est pourtant de nous refuser à une telle interprétation, qui n e relève que de la réticence profonde des anarchistes envers tout symbolisme. A les croire, les noms donnés aux groupes, aux journaux, les pseudonymes choisis pour l'action clandestine, les insignes et emblèmes, le drapeau noir par exemple, sont eux aussi dénués de signification spéciale. Cette attitude procède de l'irrespect de base de tout anarchiste : si l'homme, si l'individu ne doit s'incliner devant rien, comment pourrait-il laisser croire, par le symbole, à la transcription, la présence et l'efficace d'une idéalité quelconque? Il nous faut pourtant passer outre cette attitude iconoclaste de principe, soutenir l'hypothèse que ce qu'ils proclament n'être que signe n'en a pas moins valeur de symbole, pour examiner les retentissements réels des mots et des choses, leur sens dans la trame de l'imaginaire libertaire.

Dans ce sens même, les anarchistes soulignent que ce qui les sépare des anciens compagnons est le meilleur d'eux-mêmes, cette critique sociale dont les sociétaires des Devoirs n'avaient guère souci. En effet, leur rapport au patronat se limitait au choix du moindre mal, c'est-à-dire du patron le moins injuste, mais ne s'assortissait pas d'une critique du salariat. Même si, note Annie Guedez, la tradition veut que le «tour» ait été la première forme du refus par l'ouvrier de la souveraineté patronale, puisque le compagnon itinérant revendique le libre choix de son employeur, force est de reconnaître que là s'arrête son refus : "le compagnonnage sans doute ne lutte pas contre un patronat dont l'existence lui semble au contraire nécessaire"[3]. C'est un pouvoir de négociation, fondé sur le monopole du placement, qui est recherché par les compagnons, ce qui ne les mène jamais à la formulation d'une critique sociale contre l'organisation du travail[4]. Ignorant la haine entre classes ouvrière et patronale, le compagnonnage se sait et se veut surtout organe de modération et de conciliation[5]. C'est là, ainsi que le remarque P. Ansart[6], ce qui sépare déjà Proudhon d'un réformateur du compagnonnage comme Agricol Perdiguier, lequel veut renforcer les structures compagnonniques en mettant fin aux rituels affrontements entre membres des différents Devoirs, sans que ce projet n'implique une quelconque subversion de la réalité socio-économique de son temps, tandis que Proudhon suggère au contraire aux ouvriers de faire éclater les cadres sclérosés des organisations anciennes, y compris compagnonnales, cet éclatement étant nécessaire à toute action populaire révolutionnaire contre le régime de la propriété. L'on voit donc que ce sont des attitudes foncières du compagnonnage, cette résistance négociée au niveau des organisations, cette résistance par la fuite au niveau des individus - au lieu, pour les uns et les autres, d'une résistance par l'affrontement -, qui répugnent aux anarchistes, d'autant qu'elles s'accompagnent d'un cloisonnement dans une microsociété dont la forme et le fond suscitent la critique libertaire.

Au niveau de la forme, il va sans dire que les contraintes coutumières du compagnon, la rigueur de son initiation rituelle, l'ensemble des obligations de détail réglementant son comportement, l'interdiction de fréquenter les auberges des autres sociétés que la sienne, la sévère discipline à observer chez la Mère , le code des relations entre compagnons qui prévoit chaque circonstance où la route les rassemble, toutes limites qui composent le "Devoir", semblent en exacte contradiction avec: le type de sociabilité préconisé par les anarchistes pour qui il ne: peut y avoir de rapport social fécond que dans l'absolue liberté de chacun des partenaires.

Moins perceptible, moins évidente même, mais peut-être justement par là plus profonde et éclairante, est l'opposition de fond vis-à-vis des sociétés de compagnonnage. Une attitude constante de l'anarchisme post-proudhonien est de n'accepter qu'avec d'extrêmes réserves une qualification strictement ouvrière. L'attribution d'un destin révolutionnaire à la classe ouvrière est l'objet de controverses constantes. De là, tout regroupement à finalité exclusivement ouvriériste paraîtra plus ou moins suspect. Pour les individualistes, il est clair que la qualité d'ouvrier ne confère aucune détermination particulière. L'homme révolté ne petit traiter qu'avec ses semblables, ses égaux. Et si les masses ouvrières n'atteignent pas ce stade, elles s'exposent à des jugements lapidaires méprisants.

Mais même du côté des anarchistes acquis aux idéaux collectivistes, la question n'est pas d'une clarté aussi grande que celle. que l'on peut connaître dans les rangs marxistes par exemple. Comme nous aurons l'occasion de le voir en détail plus loin, Bakounine ne parle guère de classe ouvrière, préfère souvent le terme a-sociologique de "peupl", et oscille entre maintes définitions du peuple révolutionnaire, croyant au salut par le sous-prolétariat, les déclassés, ou exaltant parfois les vertus d'une protestation anti-étatique implicite dans le monde des hors-la-loi, etc. Par conséquent, un quelconque repli du prolétariat sur lui-même, son auto-protection à la manière du compagnonnage, sont loin de susciter l'approbation de Bakounine ni d'aucun anarchiste, qui tiennent le rêve de révolte pure de l'individu pour plus de précieux que celui de l'élaboration révolutionnaire par les masses. La définition stirnérienne du "bourgeois", dans la mesure où elle est parfaitement applicable à l'ouvrier organisé, rend fort bien compte de cette manière de penser[7].

On touche là à une spécificité marquant l'anarchie entre toutes les écoles du socialisme. Un conflit entre deux rêveries n'y trouve jamais sa solution : celle d'un peuple révolutionnaire large et puissant, avançant à pas lents, mais dont chaque pas est celui d'une armée, laissant sa trace indéfectible, et celle de la radicalité de l'individu, lui certes sujet aux désastres, mais seul diable possible, car les masses n'ont ni la force ni le génie de le devenir.

En tout état de cause, la protestation est toujours jugée indigne si elle ne va pas jusqu'à son terme. Et ce terme est défini par les anarchistes de manière maximaliste : ce ne peut être que l'anarchie elle-même. On peut alors être ouvrier, et organiser des sociétés d'ouvriers, si c'est pour fonder l'Anarchie; si c'est pour autre chose, c'est-à-dire forcément moins, cela n'en vaut pas la peine. Pour elle, l'anarchiste sera capable de mettre en oeuvre des rituels bien autrement sévères que ceux des sociétés de compagnons, et d'appeler à une cohésion sans faille à l'intérieur de petits groupes. Mais si l'anarchie n'est pas au terme, il rejettera toute participation communielle comme réminiscence de religiosité sans objet.

Ainsi le mot compagnon, dans le sens anarchiste, nous semble devoir être analysé dans une rupture d'équilibre relativement imprécise entre une qualité ouvrière et une qualité anarchiste. Il ne fait pas de doute qu'à l'origine, son emploi par les libertaires ne réponde à un souci de qualification ouvrière. Tennevin, appelé à s'expliquer de ce terme devant la Cour d'Assises de l'Isère, au procès des anarchistes de Vienne en 1890, répond : "Quand les républicains ont voulu se désigner séparément des monarchistes, ils ont pris l'appellation de citoyens; nous qui méprisons le droit de cité, nous avons cherché un terme absolument ouvrier et nous avons adopté celui de compagnon; cela veut dire compagnon de lutte, de misère, quelquefois aussi de chaînes".[8] James Guillaume à son tour indique cette même source : "Pour les ouvriers, la qualité de producteur prime celle de citoyen (c'est pour cela que les membres de l'Internationale s'appelaient entre eux compagnons et non citoyens)".[9] Et pourtant une dynamique, qui est à la fois d'extension et de restriction, tend constamment - sans que jamais cette tendance puisse être fixée sur un pôle ou sur l'autre - à substituer dans la rêverie libertaire l'anarchiste à l'ouvrier.

Mais c'est pourtant peut-être dans cette mouvance, dans cette tension elle-même, qui pousse sans cesse à une bipartition dans les rangs libertaires entre deux grandes tendances - que pour schématiser l'on peut nommer collectiviste et individualiste - que l'on peut à nouveau rapprocher utilement l'anarchisme et l'ancien compagnonnage, non pas au niveau des contenus sociaux et des projets historiques, mais de structures homologiques des trajets imaginaires. Ceci d'ailleurs ne surprendra guère puisqu'il ne s'agit que de souligner la présence, dans l'un comme dans l'autre de ces trajets, d'un modèle majeur d'organisation des contenus symboliques. En effet, la structure d'opposition, ou la "logique de la contradiction" qu'A. Guedez s'étonne de découvrir dans les mythes concurrents du compagnonnage[10], n'est autre qu'une des formules de la "coïncidentia oppositorum"[11], une structure de la cohérence dans le contraste, sinon dans l'opposition. Celle-ci se manifeste à l'évidence dans l'éternel conflit, les rixes incessantes entre sociétés rivales, qu'il faut accepter de reconnaître au fondement de la vie compagnonnique, comme le prouvent du reste les échecs répétés de toutes les tentatives pour n'y voir que les épiphénomènes néfastes et douloureux tentatives historiennes venant buter sur l'impossibilité de les expliquer raisonnablement[12], comme tentatives "sur le terrain" de conciliation définitive, dont la plus fameuse reste celle de Perdiguier. Si les conflits apparaissent comme l'un des temps nécessaires et vivifiants de l'existence compagnonnale, c'est qu'ils viennent à chaque instant redire la dualitude mythique qui fonde les Devoirs. C'est en ce sens, et on ne peut plus justement, que l'on a pu dire que les compagnons "ont besoin de querelles comme de symboles"[13].

 

Or la multiplicité symétrique des mythes compagnonnaux, la répartition inéluctable des compagnons en sociétés rivales issues du mythe d'Hiram ou de celui de Maître Jacques[14], trouvent leurs correspondances dans les destins libertaires. Les références mythiques - ou du moins sujettes à mythification de ces derniers, sont aussi bien la source d'oppositions, ou de tensions homologues qui, comme nous l'avons annoncé dans ce chapitre, animeront toute l'histoire du mouvement anarchiste. Pour peu que l'on transpose quelque peu les contenus - et les simplifie, ne retenant qu'une des "leçons" des mythes -, au destin d'Hiram - organisateur du collectif, intendant et initiateur des ouvriers à la maîtrise - répondra celui des tendances de l'anarchisme collectiviste qui ne conçoivent leur action qu'intégrée à la société - au peuple --; l'un et l'autre s'opposant structuralement au destin de Maître Jacques - lui rebelle à l'intégration, vagabond puis ermite - et à celui des individualistes, les "en-dehors", tout autant jaloux de leur autonomie. Cette commune structure nous renseigne donc sur l'identité anarchiste à laquelle renvoie le terme de "compagnon". Pour les libertaires comme pour les compagnons des Devoirs, il s'agit sous ce terme d'incarner un même esprit dans un destin à la fois semblable et différent, c'est-à-dire "se reconnaître dans l'un des multiples visages des fondateurs".[15]

 

2. Parcours mythiques - Charisme - Initiations

 

S'il faut désigner une figure qui sera, en ce domaine du mythe, celle de l'ancêtre fondateur, ce sera indiscutablement celle de Bakounine. Nul, ni Proudhon, ni Stirner, qui est d'ailleurs assez mal connu, ni aucun de leurs grands successeurs, pas même Kropotkine, n'atteint à un rayonnement comparable à celui de Michel Aleksandrovitch Bakounine, prince russe et père de tous les anarchismes.

Une étude de son portrait et de la signification de celui-ci pour les anarchistes permettra à la fois de saisir son caractère propice à la mythification et, en examinant le type de lien que les libertaires peuvent entretenir avec lui, d'éclairer sous un nouvel angle le "rêve du compagnon". De nombreuses analyses consacrées à ce jour à Michel Bakounine nous semblent laisser échapper partiellement le personnage dans la mesure où elles procèdent d'une volonté unificatrice et réductrice. Que l'on s'attache avec les penseurs libertaires à la doctrine anarchiste: de Bakounine, en analysant son enracinement historique, en dégageant son aspect constructeur, ou que l'on désire souligner quelques originalités ou au contraire conformités de l'exilé russe dans l'ordre politique ou philosophique - son antithéologisme, certains aspects de son "marxisme" etc. -, l'on a souvent le sentiment qu'à procéder à une telle mise en ordre, à imposer une telle rigueur de réflexion à partir d'un angle d'approche particulier, on laisse échapper, avec le caractère fondamentalement brouillon, chaotique du personnage, l'essentiel de son intérêt.

Car celui-ci n'est pas seulement foncièrement polyvalent, ne se contente pas de juxtaposer des activités variées, multipliant les niveaux de son action révolutionnaire (complots, agitation, organisation de mouvements de masse, polémique, philosophie...), se montrant avide de prendre part à chaque velléité de révolte de par l'Europe; il n'est pas seulement celui qui synthétise un ensemble de tendances diverses et parfois contradictoires, sa caractéristique est de se redoubler lui-même, pour être cet "agitateur-agité", ce "poète du chaos" dont parle Fernand Rude[16]. Il nous faut donc le saisir dans ce désordre même, dans toute sa puissance, dans son excès.

Bakounine, au physique comme au moral, a les dimensions de la légende. On le décrit colosse, grand, trapu, de stature imposante. Un front immense; sa tête, dit-on, "évoquait celle d'un lion"[17]. Tout en lui respire "la générosité, la bienveillance et la force., la sincérité du coeur et la puissance géniale de la volonté"[18]. Insatiable, il lui fallait sans cesse, disait-il, "une affaire sur les bras" (entendre : une affaire révolutionnaire) ; sans cela il ne pouvait pas vivre. Il vivait donc "de thé et de tabac, et passait les nuits entières à écrire, sur une petite table, des lettres, des opuscules, avec une verve endiablée, se tenant en rapport avec les révolutionnaires de tous les pays"[19]. C'était une "nature large, exubérante, chaotique", nous dit Ricarda Huch, idée que complète Varnhagen von Ense en remarquant ses "traits nobles et énergiques, et pourtant mélancoliques, ses yeux pleins de bonté et de douceur"[20]. Car Bakounine est un titan rêveur.

C'est dans les songes, dans la puissance des rêves, que le personnage se révèle tel qu'en lui-même. Car l'Europe, car le monde semblent n'avoir jamais été â sa mesure. Il y avait, remarquait Herzen, "au fond de la nature de cet homme, le germe d'une activité colossale pour laquelle il n'y eût pas d'emploi"[21]. C'est la même idée qu'exprime Brupbacher en notant : "Il semblait que la révolte de toute l'Europe se fut réfugiée dans son cerveau et dans son coeur, et si cette Europe réduite en esclavage, avait ressemblé à Bakounine, il ne serait pas resté pierre sur pierre de la société féodale et bourgeoise"[22]. C'est pourquoi nous insistons, avec ceux qui l'ont connu, en deçà des actes et même des pensées formulées, sur la figure du géant naïf à l'innocence révolutionnaire, du "bon-enfant terrible et dangereux", comme disait de lui Natalie Herzen[23], car c'est, bien plus qu'à ses multiples carrières, au "principe de l'éternel mouvement qui gît au fond de son âme" et qui "efface tous ses défauts personnels"[24], que se rapporte toujours, spontanément, l'imagination anarchiste.

Pour cette dernière comme pour nous, les traits particuliers, anecdotiques, de son existence apparaissent comme des révélateurs de sa démesure. Ne citons que son goût prononcé pour exagérer, provoquer, le caractère fantastique de son parcours, lui qui fut mêlé à toutes les révolutions d'Europe de près ou de loin depuis 1848, lui qui réalisa la plus grande évasion du monde[25], son incapacité à donner une forme définitive à ses idées, car les livres, comme le monde, étaient trop petits pour ses rêves. Il savait ses écrits difformes, car toujours abandonnés en cours de route pour courir à une action nouvelle, toujours repris en leur point de départ et gonflés des éléments de la lutte qui venait d'être menée., si bien qu'il ne parvenait jamais à traiter plus d'un ou deux des points qu'il s'était proposé au départ d'établir[26]. Il disait lui-même, à propos de L'empire knouto-germanique et la révolution sociale, son premier livre : "C'est une monstruosité, mais qu'y faire, si je suis un monstre moi-même".[27]

Cette difformité de l'être et des songes conduit, et c'est le point central de cette analyse, à une rêverie de l'informe. Il nous paraît éminemment nécessaire et fécond, contrairement à toutes les volontés d'unification-réduction de la pensée et du personnage de Bakounine, de pousser l'analyse de ses excès, ses difformités, ses outrances, jusqu'à une telle rêverie de l'informe, plutôt que de les abandonner au titre de caractères secondaires, de faiblesses d'une personnalité, de résidus de l'imaginaire.

L'informe est chez Michel Bakounine une rêverie de l'engloutissement dans et par la puissance vitale. Contre toutes les représentations à forte coloration diurne qui fondent pour la lutte sociale une morale de l'effort, qui est toujours effort d'expulsion, de séparation entre le Bien et le Mal, le prolétarien et le bourgeois, la réaction et la révolution etc., Bakounine inaugure une rêverie de l'engloutissement qui se caractérise par cette intention de l'imaginaire où la descente s'accomplit dans des figures de redoublement[28].

Il s'agit bien de s'enfoncer dans les ténèbres, les mauvaises passions, le satanisme etc., afin non pas de faire émerger une épure d'autre vie, si délicate qu'on oserait à peine en rêver à présent, mais au contraire d'affirmer pleinement et fermement que le principe de régénération, que l'authenticité des révolutions réside dans la démesure du présent, dans le bouillonnement des passions, dans le mauvais traitement fait aux valeurs sociales. Nous parlons de figures de redoublement à propos de l'enfoncement de l'individu dans les valeurs ténébreuses car il s'agit pour lui de les absorber afin de les faire participer à un principe de renouveau; mais cri même temps, l'individu ne peut lui-même parvenir à concevoir ce renouveau s'il n'a pas été absorbé par les ténèbres. L'enfoncement est alors un principe dynamique, une règle de multiplication. Et dans ce rêve d'une orgie des passions, de renouvellement par retour, ou passage à l'informe, nous retrouvons la forme, foncièrement nocturne, de la coïnciderntia oppositorum, qui atteint ici le stade de "la régression dans l'amorphe et dans l'indistinct, la récupération d'un état. dans lequel tous les attributs s'abolissent et les contraires coïncident"[29]. C'est cela précisément, c'est ce rêve particulier qui fait de Michel Bakounine le père mythique de l'anarchisme, puisqu'en lui coïncident toutes les tendances contrastées ou contradictoires de l'âme libertaire.

Ayant saisi son origine et sa puissance, l'on ne peut être surpris de la filiation immense que Bakounine a suscitée. Certes il a, comme dit André Salmon, "commandé à toutes les violences anarchistes, et loin encore après sa mort"[30] ; mais plus encore il a représenté pour chaque anarchiste, jusqu'aujourd'hui, une rencontre personnelle. L'entrée en anarchie, pour tout militant libertaire, semble en effet s'opérer comme un ressourcement mythique, dont l'origine imaginaire est la personne de Bakounine. Contrairement au mouvement marxiste où la connaissance - au moins par ouï-dire - de l'oeuvre de Marx est tenue pour nécessaire, un appui sur les écrits de Bakounine est tout à fait secondaire dans le trajet par lequel on devient anarchiste. Comme le note Kaminski, "les anarchistes le rencontrent sur leur chemin, ils n'ont pas besoin de se laisser convaincre par lui, ils se reconnaissent tout de suite en lui. Ils trouvent en lui un idéal : l'homme d'action qui est en action perpétuellement. Et voilà leur précurseur! L'histoire de la rencontre d'un anarchiste avec Bakounine mort ou vivant est toujours la même. C'est le coup de foudre. Leur coïncidence théorique n'est que postérieure"[31].

Cherchant à approfondir la compréhension de ce rapport des libertaires avec cet "idéal-type" que constitua pour eux la figure de Michel Bakounine, nous avons interrogé, des anarchistes d'aujourd'hui à son propos. Si l'on souligne, dans les réponses obtenues, que c'est lui qui a su le mieux illustrer l'esprit anarchiste, on n'en tire aucune conclusion quant à une paternité doctrinale. Bakounine n'est donc pas à proprement parler un précurseur; il est, entre tous les anarchistes, sans que cela définisse un privilège, un anarchiste particulièrement aimé et estimé. "C'est un homme qui nous plaît, c'est tout", nous dit-on. Et l'on ne manque jamais de souligner à ce propos que l'esprit anarchiste ne saurait s'accommoder de la reconnaissance de chefs, quels que soient les hommes qui pourraient prétendre à ce rôle. Pourtant, s'il n'existe pas de chefferie anarchiste, il ne fait pas de doute que le personnage de Bakounine, de son vivant comme après sa mort, s'il n'exerce aucune domination de type traditionnel -- ni bien entendu, légale, pour reprendre les termes weberiens -, se caractérise par un ascendant de type charismatique[32].

C'est la puissance tumultueuse. que nous venons d'évoquer qui fonde le charisme de Bakounine. De son vivant même, le colosse de l'anarchie semble échapper à la condition humaine normale. A Naples, nous dit Malatesta, "on parlait de lui comme d'un personnage extraordinaire et, comme d'habitude, on exagérait ses qualités et ses défauts. On parlait de sa taille gigantesque, de son appétit formidable, de sa mise négligée, de son insouciance pantagruélique, de son souverain mépris de l'argent[33]. .L'expérience de Malatesta lui-même permet de mesurer la réalité de cet ascendant charismatique, à travers sa reconnaissance enthousiaste : "A force d'en entendre parler, Bakounine serait devenu, pour moi aussi, un personnage de légende, et le connaître, l'approcher, me réchauffer à sa flamme était pour moi un ardent désir, presque une obsession"[34]. Lev Dejtch quant à lui, arrivé trop tard en Suisse pour pouvoir le connaître, permet mieux encore d'établir, par comparaison, la puissance charismatique du personnage. Il montre comment, à l'opposé des guides de la jeunesse russe en cette époque, des Tchernichevski, Dobrolioubov, Pisarev, etc., qui furent toujours l'objet de haute estime et d'affection retentie, à l'opposé de ceux-ci qui d'abord donnaient à penser, Bakounine donnait à rêver : en écoutant parler de lui ceux qui l'avaient connu, "nous avions parfois l'impression d'être transportés dans des temps légendaires où géants et titans accomplissaient leurs exploits. Pour mon imagination juvénile, Bakounine, avec sa vie mouvementée, était une sorte de torrent, puissant et rapide, qui emportait tout"[35]. Fait significatif enfin du phénomène charismatique, l'identité humaine, les caractéristiques particulières de l'individu concerné s'annulent au profit du seul gigantisme de légende. Bakounine rejoint alors tous les héros participant à cette dernière, et se confond à eux : à ce propos, Malatesta raconte encore que, l'ayant accompagné à Saint Imier, il fut surpris de l'entendre acclamer aux cris de "vive Garibaldi!"[36].

L'on comprend ainsi de nombreuses images de Bakounine qui font état du fait que son talent extraordinaire de persuasion tenait moins de la conviction que du contact. La puissance du titan rêveur est de capter les âmes, et de les faire rêver à leur tour. "Je voyais, dit Mme A. Bauler, que sa force était de prendre possession des âmes humaines. Sans aucun doute, tous les hommes qui l'écoutaient étaient prêts à tout à sa moindre parole"[37]. C'est ce "contact magnétique" avec les foules, que Bakounine recherchait explicitement, qui peut le mieux caractériser son emprise sur les compagnons. L. Dejtch parle encore de sa capacité à "électriser" les masses, et souligne que par opposition à Herzen, l'Olympien inaccessible, qui suscita de l'admiration mais peu d'attachement personnel, Bakounine avait partout "laissé des amis dévoués corps et âmes"[38]. Tourgueniev enfin, à travers le personnage de Roudine, directement calqué sur Bakounine, nous parle de lui comme d'un homme qui "n'a pas seulement la puissance de vous émouvoir, il vous pousse. en avant, il vous empêche de vous arrêter, il vous retourne de fond en comble, il vous incendie"[39].

Et pourtant, il reste vrai de dire que cet ascendant indiscutable, ne s'est jamais traduit par une véritable domination. Entendons par là que ce n'est pas un rapport d'autorité qui s'est réalisé à la faveur de ces liens. De son vivant, ses compagnons horlogers du jura Suisse ne le considèrent nullement avec l'attention respectueuse que l'on peut porter à un maître lorsque celui-ci est aimé. Si Bakounine fut profondément aimé de tous, il fut considéré avec tendresse "à la fois comme un enfant et comme un père"[40]. Après sa mort, les témoignages de l'absence de ce sentiment et de l'absence de toute espèce d'autorité intellectuelle se recoupent. Kropotkine, de passage à son tour dans les montagnes neuchâteloises dans les années 1870, remarque en ces termes le rapport étonnant noué par Bakounine avec les membres de la "Fédération" : "Le nom de "Michel" revenait sans cesse dans leurs conversations, non pas comme le nom d'un chef absent dont les opinions feraient loi, mais comme celui d'un ami personnel dont chacun parlait avec amour, et dans un esprit de camaraderie. Ce qui me frappait le plus, c'était que l'influence de Bakounine tenait moins à sa supériorité intellectuelle qu'à sa personnalité morale"[41]. Et longtemps après, Fritz Brupbacher peut faire la même remarque : "J'ai personnellement connu, quarante ans après cette époque, de vieux ouvriers horlogers qui me parlaient de leur "Michel" avec des larmes dans les yeux et qui lui étaient éternellement reconnaissants de les avoir éveillés â une vie nouvelle'[42]".

 

Ce type de relation avec les figures mythiques - nous n'avons évoqué que celle de Bakounine parce qu'elle est incontestablement la plus puissante[43], mais d'autres se trouvent à proximité, qui chacune à sa manière viennent alimenter de leur sève la rêverie libertaire : celles de Proudhon, le philosophe de l'établi s'il en est, (le Stirner, "l'étonnant métaphysicien de brasserie[44]", de Kropotkine, le second Prince Noir, de Louise Michel, la Vierge Rouge , etc. --- contribue à nous renseigner sur la teneur du "compagnonnage" anarchiste et nous amène â saisir ce que l'on peut entendre par "fraternité libertaire".

Dans l'existence quotidienne, le rapport social qui actualise ce lien entre "compagnons" apparaît assez distant. Il n'y a pas de droits et devoirs du compagnon anarchiste; pas de minimum idéologique, ni de minimum d'action pour que l'on puisse traiter avec tel ou tel. C'est d'homme à homme que l'on traite toujours, globalement. C'est pourquoi les rapports d'organisation ne recouvrent toujours que de manière très lointaine les liens réels entre les individus. Le rapport de "compagnon" s'établit comme une configuration imprécise, toujours à actualiser, d'une sociabilité originale. Son fonctionnement, son efficacité se situent manifestement ailleurs que dans un organigramme, fût-il aussi peu contraignant que possible, mais au niveau de "la vie", tellement valorisée comme disponibilité impétueuse., que rien ni personne ne peut codifier.

Pourtant ces hommes qui ne peuvent vraiment et pleinement se laisser organiser, et qui veulent souvent donner d'eux-mêmes une image rugueuse et indocile, connaissent entre eux un lien permanent qui dépasse le hasard des rencontres particulières. Si, entre libertaires, on peut traiter globalement d'homme à homme, négligeant donc les considérables différences entre les individus, c'est parce qu'existe en tout anarchiste le soupçon d'une coupure radicale entre l'homme anarchiste et l'homme en général, les autres, quels qu'ils soient. Il y aurait inconciliabilité entre les deux catégories. L'on ne peut pas être plus ou moins anarchiste, on l'est ou on ne l'est pas. Les anarchistes reconnaissent infailliblement ceux qui sont des leurs et ceux qui ne le sont pas. Point n'est forcément besoin ensuite d'en savoir davantage. C'est donc la dynamique d'un rêve d'altérité qui, d'abord, les unit. Se reconnaissant pour hommes de l'infini désir, ils se: savent livrés de corps et d'âmes à leur puissance, mais aussi à leurs contradictions, leurs faiblesses, leurs obscurités. Leur lien est dans la reconnaissance mutuelle de l'une comme des autres, et dans la reconnaissance, cri elles, d'une altérité. Les compagnons sont des rêveurs d'autres mondes, et surtout d'autres hommes. L'homme anarchiste se pense debout, vainqueur à lui seul de sa servitude, et complice fraternel des puissances qui peuvent détruire les multiples obstacles à la liberté. Il s'estime insaisissable et irréductible, et c'est d'abord cette identité lointaine, distante, entre des révoltés, ce même: rêve d'altérité qui, au-delà de leurs différences, les fait se reconnaître pour "compagnons", bien mieux que les considérations de situations sociales et politiques.

Toutefois déceler ici la base de leur "compagnonnage ne suffit pas pour autant à les reconnaître comme "frères". La fraternité libertaire est une fraternité initiatique virtuelle. Elle prend source dans le rapport, que nous venons d'analyser, avec es multiples colorations du mythe, mais l'initiation ne lui est que promise, elle ne peut pas avoir eu lieu, car elle ne peut prendre qu'une forme : celle de la révolution. Les anarchistes savent qu'ils se retrouveront, frères enfin, et avec eux l'humanité entière, mais seulement dans une. vie prochaine, dans laquelle la révolution aura marqué l'entrée. L'on peut donc analyser leurs parcours comme un rituel de passage à longue durée. Initiés à la source du mythe, multiples et différents à l'image même des fondateurs, ils sont, aussi longtemps que .la révolution ne les aura pas réunis comme frères, dans une phase d'entre-deux, une phase "liminaire" dirait Van Gennep[45], où ils ont quitté la condition humaine normale -- c'est là leur altérité, c'est là ce qui les définit comme "compagnons" - sans pouvoir encore accéder à de nouvelles communautés d'hommes que seule la libération de tous rendra possibles, et qui inaugureront le règne de la fraternité.



[1] Tiré de : Alain Pessin (1848-1914.) in "La rêverie Anarchiste", 1982 - Bibliothèque de l'imaginaire -librairie des Méridiens.

[2] Mermeix, " La France socialiste, Notes d'histoire contemporaine", Ed. Fetscherin et Chuit, Paris 1886.

[3] A. Guredez, L'homme qui passe (le compagnon itinérant) pp. 142-19,1.

[4] Même la pratique de la "damnation" d'un atelier n'a de sens que d'isoler le maître abusif afin de l'obliger à rendre son atelier à nouveau fréquentable. Les anarchistes regretteront qu'elle ne s'adresse qu'à la personne et non à la fonction du maître.

[5] Cf. ,LP. Bayard, Le compagnonnage en France, p. 383.

[6] Cf. P. Ansart, Naissance de l'anarchisme, p. 115.

[7] Résumant cette conception, Émile Armand indique que la caractéristique du monde bourgeois selon Stirner est un enracinement existentiel fondé sur le "sérieux" et ses corollaires de stabilité, de respectabilité, etc. "Le bourgeois peut être ouvrier ou rentier, se dire républicain, radical, socialiste, syndicaliste, communiste, voire. anarchiste; il peut appartenir à une Loge, à la Ligue des droits de l'homme, à un comité électoral socialiste., à une cellule communiste, il peut même payer sa cotisation à un parti révolutionnaire. Tant que sa vie repose sur une base sûre, tant qu'il offre des garanties morales, bourgeois il est, et bourgeois il reste." E. Armand, Le stirnérisme.

[8] Procès des anarchistes de Vienne devant la cour d Assises de l'Isère, p. Il.

[9] J. Guillaume, Lettre inédite à l'Avant-Garde, 12-1 1-1905, cit. par,J. Maitron, Le mouvement .... t. I. p, 130.

[10] A. Guedez, Les mythes vivants du compagnonnage, p. 167.

[11] Cf. G. Durand, Science de l'homme et Tradition, p. 203 sq.

Cf. M. Eliade, .Méphistophélès et l'Androgyne, p. 95 sq.

[12] Cf. par ex. E. Coornaert, pour qui "rarement expliquées, presque toujours injustifiables, leurs brutalités restaient le mode d'expression de leur Orgueil collectif" - Les Compagnonnages en France, p. 78, ou E. Dolleans, qui ne voit dans ces "rancunes" que la preuve de l'absence de tout sens de la solidarité ouvrière chez les compagnons; Histoire du mouvement ouvrier, t. I., p. 44.

[13] Cité par E. Coornaert, op. cit, p. 313.

[14] Bipartition qui se complique en tint en tripartition puisque le trajet de Maître Jacques s'accompagne de celui du Père Soubise.

[15] A. Guedez, ibid., p. 68.

[16] Cf. F. Rude, Bakounine, militant de la Première. Internationale , in : M. Bakounine, Le socialisme libertaire, p. 31, et F. Rude, Bakounine ou la contestation permanente, in M. Bakounine, de la guerre à la Commune , p. 9.

[17] A. Paniapva - Biranskaia, cit. par A. Lehning, :Michel Bakounine et les autres, p. 71

[18] F. Turatti, cit. in ibid., p. 26.

[19] ibid.

[20] Cit. par J. Barrue, Notes à F. Bruftbacher, Bakounine ou le démon de la révolte, pp.142-143 et 155.

[21] Cit. par L. Comby, Histoire du mouvement anarchiste, p. 17.

[22] F. Brupbacher, Op. cit., p. 167.

[23] Cit. par F. Rude, Bakounine, militant de la Première Internationale , op. cit., p. 30. 24

[24] Bielinski, cit. par A. Dunois, Michel Bakounine, pp. 185-186.

[25] Arrêté en Allemagne, livré à l'Autriche puis à ta Russie, enfermé à St-Petersbourg, déporté en Sibérie, il s'évade, passe au Japon par Nikolaievsk, puis gagne clandestinement San Francisco, New-York, enfin Londres, où il retrouve Herzen, avant de rejoindre la Suisse et l'Italie quelques années plus tard, non sans avoir tenté de rallier, par la Suède , la Pologne pour s'y joindre à l'insurrection contre la domination russe.

[26] Cf. M. Nettlau, Introduction à M. Bakounine, Oeuvres, t. 1, pp.9-10.

[27] Cit. par A. Lehning, Introduction â M. Bakounine, Oeuvres, complètes, t. 1, p. XXIX.

[28] Cf. G. Durand, Les structures, p. 238 sq.

[29] M. Eliade, Traité d'histoire des religions, p. 3;12.

[30] A. Salmon, op. cit., C. 1, p. 28.

[31] E.H. Kaminski, Bakounine. la vie d'un révolutionnaire.

[32] Cf. M. W, Économie et société, t. 1, p. 249 sq

[33] Cit. par A Leahning, Op. cit., p. 313.

[34] Ibid, p. 314.

[35] Cit. in ibid., p.396.

[36] ibid, p. 315.

[37] Cit. par A. Dunois, op. cit., p. 186.

[38] Op, cit., p. 396-397.

[39] Cit. par F. Rude, Bakounine, militant de la Première Internationale , op. cit., p. 30, L 'on se souviendra encore de la "possession" de Souvarine, l'anarchiste du pays minier, par l'image de Bakounine. Cf'. E. Zola : Germinal, p. 282.

[40] J. Maitron, Le mouvement..., t. 1, p. 49.

[41] P. Kropotkine, Autour d'une vie, p. 294.

[42] F. Brupbacher, op. vit., p.94.

[43] C'est pourquoi, dans nos développements ultérieurs, nous accorderons souvent à l'imagination et la pensée bakouniniennes une place privilégiée, ce que de rigoureux historiens de l'anarchie pourront parfois juger quelque peu excessif. Or une telle insistance, qui tomberait sans doute sous le coup de cette critique si notre propos était d'écrire une histoire de l'anarchisme et de sa pensée; se trouve pleinement justifiée - le présent chapitre, pensons-nous, l'a déjà prouvé - dans une sociologie compréhensive de sa rêverie.

[44] A. Salmon, op. cit., t. 2, p. 180.

[45] Cf. A. Van Gennep, Les rites de passage.


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