"Tuez-les tous, dieu reconnaîtra les siens"

Ou bien

"Un bon prisonnier est un prisonnier mort"[1]

 

Régis SCHLEICHER Clairvaux, le 22 mars 04

 

"N'épargnez aucun homme, aucune femme (... ), tuez-les tous !"

Général von Trotha

 

"Ils" ont laissé Georges durant des années errer sans soins aux confins de la folie. "Ils" ont atermoyé pendant trois mois avant de consentir à l'hospitalisation de Jean-Marc après qu'on lui a eu détecté un cancer. "Ils" ont attendu la quatrième perte de connaissance de Joëlle pour daigner l'opérer de métastases au cerveau... "en urgence" ! "Ils" se languissent du troisième accident vasculaire cérébral de Nathalie, pour qu'elle sorte de prison gisante à tout jamais.

Bien sûr "ils" n'ont pas lancé un vernichtungbefehl (1) à notre encontre :"il" ont simplement posé les jalons de notre trépas. Après avoir cherché à nous briser psychiquement en nous soumettant à de longues périodes déstructurantes d'isolement drastique, pour nous pousser au suicide, "ils" font désormais en sorte que la maladie substitue le bourreau. Pas par sadisme ou par méchanceté, mais parce que nous symbolisons l'opposition sans concession à cette politique qu'"ils" développent et qui s'appelle mondialisation. Une politique qui se projette hors des frontières occidentales sous la forme de guerres pour la suprématie, en vue de la conquête de nouveaux marchés et de nouvelles sphères d'influence économique. Une politique aux effets dévastateurs, qui se traduit dans la vie des gens ici par des coupes claires dans les acquis et les budgets sociaux ; par des délocalisations d'emplois et des fermetures d'entreprise ; par la réduction du marché du travail et l'accroissement de la paupérisation. Bref, une politique qui signifie toujours plus d'exclusion et qui produit par conséquent une montée du mécontentement, de la mobilisation, de la rébellion. Pour qui l'expérience que nous avons développée est susceptible de constituer un pôle de référence. Dans ces conditions, notre disparition devient pour "eux" une exigence stratégique de cet affrontement dont on ne prononce plus le nom : la lutte des classes, expression fondamentale de l'antagonisme opposant les exploités aux les exploiteurs, les pauvres aux riches, " la France d'en bas" à " la France d'en haut".

Ayant lutté avec détermination et nous étant situés sans ambiguïté dans le camp de ceux qui excluent l'option du profit économique au détriment du bien-être de ces hommes et de ces femmes qui construisent le monde, nous incarnons dans l'imaginaire collectif le refus irréductible de la dégradation des conditions de vie et de travail, du quadrillage des quartiers, de la militarisation du tissu social ; le rejet du commerce des armes, des guerres "humanitaires », du business de la sécurité ; la réfutation de l'ensemble des poisons aliénants qu' "ils" distillent au quotidien dans le cerveau de chacun et dans le corps de la société tout entière."Ils" ont en conséquence décidé notre mort à petit feu. La forme en importe guère et feront aussi bien l'affaire la lente agonie de la perpétuité que la sape silencieuse et létale de la maladie. L'essentiel pour "eux», c'est que le vent de la prise de conscience que nous soufflions soit effacé de la mémoire de la résistance. Bien sûr les apparences seront respectées, et il y aura même une autopsie. Ensuite l'on nous enterrera comme d'autres ont enterré leurs rêves d'espoir, de fraternité et de partage : à tout jamais. Il se trouvera sans doute même certains pour honorer notre mémoire.

Une autre hypothèse est de se mobiliser aujourd'hui afin d'éviter que l'un ou l'une de mes camarades de lutte ne sorte de l'espace carcéral dans une caisse en sapin, car c'est en ces termes que le problème se pose dorénavant. Aujourd'hui plus que jamais la solidarité s'affirme comme l'arme de la vie.

(1) : Ordre d'extermination.

 

[1] Titre de moi, JC. Texte diffusé par NLPF c/o LPJ, 58 rue Gay-Lussac 75005 Paris.


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